Où ? Who ?

Fin d’année.. Bien des choses ont changé depuis le 18 décembre 2019…
Ce qui me reste particulièrement de ces dernières semaines c’est l’espèce de spleen dans lequel les élèves nagent entre boulot, les « on a plus de vie, Monsieur ! », les choix à faire, les obstinations et les résultats, les soupirs et les endormissements… Comment te laisser dire « je vais en médecine » si, quand tu es aux taquets, tu es à 14….? Comment ne rien te dire quand on voit que tu as des capacités ici alors que tu t’obstines à vouloir faire des matières dans lesquelles tu ne réussi pas ? Comment rester de marbre quand tu fous rien de rien alors qu’on voit tant de qualités gâchées….? Pourtant, les élèves de terminales avec qui je travaille (ce ne sont pas « mes » élèves. DDHC, art 1 : « libre ») sont conscients de beaucoup de choses, du point de vue boulot, du point de vue caractère… Mais on est tous embarqués dans des discours… Discours des écoles. Discours des « spécialistes de l’orientation ». Discours des parents. Discours des professionnels… Genre « en ce moment dans telle branche, il y a du boulot, trop facile d’en trouver »… Et si tu fais partie de la minorité qui n’arrive pas à trouver du boulot dans cette branche là, si tu présentes mal, si tu sais pas te vendre.. oualou, tu passes pour un idiot !
Dans les sciences humaines, il est une manière de parler qui devrait être plus souvent entendue : celui de la « construction »… Tu te construis… Et tu construis ce que tu deviens :change de perspective, ce n’est pas prendre la file, mais construire ce que je veux être… Construire ce que je vais donner dans mon boulot… et c’est assez simple car en fin de compte (et non pas « au final ») les employeurs cherchent deux types d’employés : les esclaves et les génies… Les esclaves sont une grande proportion d’entre nous : on leur demande de faire une tâche et c’est tout, cherche pas plus… On va me dire que esclave c’est pas le mot.. ok.. Machine ? Oui parce que ce genre d’emploi c’est le candidat type pour une mécanisation-automatisation… Le « serreur » de boulons à la mode Charlot-dans-les-temps-modernes…. Le chargé de mission de n’importe quelle administration. Le/la secrétaire a qui on demande surtout d’apporter le café (chose infaisable sauf à un robot mêlant cafetière et drone…)… L’employé de banque, supermarché, centre d’appel, bureau etc… Le prof qui applique les programmes ???? Fais ton job et ferme la.. Car si tu la fermes pas, un jour, tu seras remplacé par une machine. Le prof sera remplacé par une machine ?.. ça semble impossible quand on pense à un prof qui fait vibrer ses troupes… Mais c’est drôlement plus envisageable quand le prof en question (car ce peut être le même, oui, oui…) est un super soporifique… Voilà donc le premier type d’employé que cherchent les employeurs… Le second type ce sont les génies.. C’est à dire que parfois, (oui il faut que je vous avoue, il y a moins de génies que d’esclaves) les employeurs cherchent des gens qui sont spécifiques, spéciaux, particuliers, originaux…. Et l’originalité ça se cultive. Faut il absolument se balader avec une plume dans le dos, le masque sur les yeux ou un mélange très trash de modes vestimento-comportementales…? Pas forcément. On en revient aux données de base de notre capitalisme libéral. Si l’individu est unique, cultive ton unicité… Ne cherches pas à suivre ou subir les formations qui feront de toi une machine mais au contraire, suit les formations qui vont te construire comme un individu original. Associer les maths et la physique, c’est classique. ça t’amènera à être un esclave-laborantin, un esclave-ingénieur…. Mais associer maths et arts, ça donne des combinaisons beaucoup plus originales….
D’ailleurs, les maths, c’est un règne hypocrite…. Tout le monde sautille en disant « les maths, les maths » comme ceux que de Gaulle imitait disant « l’Europe, l’Europe »… En fait de maths, et c’est ce qui provoque l’insomnie des collègues, on forme des gens sur des objets qu’ils n’auront plus à toucher par la suite, puisque on ne garde des maths, dans la vie économique, que les 4 opérations et les pourcentages…. La logique des maths appliqués dans la vie économique et sociale c’est l’équilibre budgétaire… Un peu faible pour ce qui peut être un véritable univers artistique… Tout ce qui reste des envolées vertigineuses et de l’organisation de l’univers, c’est une soustraction…
Et à côté de ça, il faut mener sa « vraie » vie : relations sociales, amicales, amoureuses, passions sportives, artistiques, intellectuelles, manuelles et surtout la vie spirituelle (affiliée ou non à une religion) ce que certains nomment la « vie intérieure »…..
N’oublions pas ce que disait le sage (évocation d’une parole d’expert toujours inexistant, argument de chiotte, mais tellement utilisé) : « Le chemin est tracé par celui qui chemine » … Entre deux exos, prenez le temps de vous redire cette phrase.. elle est pas si bête qu’elle en a l’air… Et j’en suis presque à la détourner en disant « le chemin n’est tracé que par celui qui chemine »….
Votre boulot vous le construisez dès aujourd’hui, par les qualités humaines et intellectuelles que vous avez et que l’enseignement que vous suivez vous permet de développer. Les recettes existent, mais la recette n’est jamais universelle ni absolue quand il s’agit de l’humain… L’école ne devrait servir qu’à cela : développer ce qu’est chacun, alors qu’elle est essentiellement une usine à formater, d’où le « hey ! Teacher !…. »

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