est-ce que tu veux lire ?

Puisque vous le demandez…. Voilà quelques lectures recommandées pour l’été…

Pourquoi lire plutôt que de regarder des vidéos…?
D’abord parce que les vidéos vous les regardez tout le temps
Ensuite parce que la lecture vous laisse le temps de vous interroger plutôt que de ne faire que réagir quand le discours est extérieur et continu.. Oui bien sur on peut toujours mettre sur pause.. -mais honnêtement- qui le fait ?

Vous pouvez lire tout ce qui apparaît dans les articles repérés dans la catégorie A LIRE, comme compte-rendus ou fiche de lecture.. déjà !
Ensuite,  entre la seconde et la première, la lecture idéale serait d’abord la presse…Le Monde, Le Figaro, Libération pour la presse nationale sont faciles d’accès… Pour les plus intéressés, la lecture de la revue l’Histoire et de la revue Carto n’est jamais une perte de temps… Si vous voulez prendre de l’avance en Spé, regardez les pages du site consacrées aux chapitres.. Il y a souvent une bibliographie et quand j’ai eu la patience de le mettre vous verrez quels bouquins sont accessibles à l’Alcazar…
Entre la première et la terminale, les conseils précédents restent valables. Les plus accros iront lire Ian Kershaw, le dernier bon biographe d’Hitler et spécialiste de l’Histoire de l’Allemagne au XXe siècle (La fin 1944-1945). Il a dernièrement publié une histoire de l’Europe déclinée en 2 tomes L’Europe en enfer (1914-1949) et l’âge global (1950 à nos jours)… Top ! Méfiez vous des bouquins concours (qu’on court, cons courts…) souvent écrits par des profs dont les dents rayent le parquet sans réel intérêt…  Je me demande encore pourquoi on fait la pub du Siècle des excès alors que Géopolitique et géoéconomie du monde contemporain, Puissance et conflits est de bien meilleure qualité.. Vous avez compris aujourd’hui tout est marché.. Donc je vous conseillerais toujours davantage les bouquins des historiens plutôt que ceux des profs d’histoire… Regardez ce que ça donne dans les pages du site consacrées à sce po…

Pour les passionnés de lecture… Oui , je sais , vous êtes encore moins nombreux, le rayon Biographie au 3eme étage de l’Alcazar est à avoir le tournis… Là encore il faut se méfier des auteurs, parfois même de certains collections, mais c’est tellement agréable ! Personnellement j’ai apprécié mettre un oeil dans les bios de Plon-plon (oui, ça intrigue au départ), Mac Mahon, Pasteur, Clémenceau, Aristide Briand, Churchill (Bedarida), Mussolini (Milza) etc… Si vous voulez retrouver le frisson du film Stalingrad, lisez les mémoires de Vassili Grossman… etc…

A lire

Bruno PATINO, La civilisation du poisson rouge, petit traité sur le marché de l’attention,Grasset, 2019

Quand on lit ce genre de livre, on est forcément amené vers cette « voix qui crie dans le désert »… Adolescents, vous nous donnez un modèle de vie ! Nous, soi-disant adultes, savons parfaitement dire quelles sont nos erreurs sans avoir le moindre geste pour ne plus les commettre !!! Nous savons pertinemment depuis Rousseau que sans régulateur, le libéralisme ressemble à la loi de la jungle : qu’importe les victimes pourvu qu’au seuil de ma porte je puisse faire ce que je veux. Nous savons pertinemment que les intérêts des grands actionnaires sont contradictoires avec les nécessités humaines ; qu’importe, tant que les actionnaires me permettent d’avoir du fric ou de la technologie, tout est bon, y compris l’esclavage de gens que je ne connais pas, tant que je reste un bon démocrate ! Le sujet du bouquin est un peu dans cette veine.. Il permet de brasser toutes les conneries qu’on a laissé installer au bout de nos doigts, ces superbes machines qui semblent nous rendre service et qui, pour le coup, nous maintiennent en esclavage… Je retiens quelques éléments…

« Une étude du Journal of social and clinical Psychology évalue à 30 minutes le temps maximum d’exposition aux réseaux sociaux et aux écrans d’Internet au delà duquel apparaît une menace pour la santé mentale » p 16

« L’économie de l’attention détruit peu à peu tous nos repères. Notre rapport aux médias, à l’espace public, au savoir, à la vérité, à l’information, rien ne lui échappe.
Le dérèglement de l’information, les « fausses nouvelles », l’hystérisation de la conversation publique et la suspicion généralisée ne sont pas le produit d’un déterminisme technologique. Pas plus qu’ils ne résultent d’une perte de repères culturels des communautés humaines. L’effondrement de l’information est la conséquence première du régime économique choisi par les géants de l’Internet.
Le marché de l’attention forge la société de toutes les fatigues, informationnelles, démocratiques. Il fait s’éteindre les lumières philosophiques au profit des signaux numériques. » p 17

un peu de vocabulaire….
no mobile phone phobia => nomophobie, pour désigner la peur panique face à l’éloignement même éphémère de son portable…
phnubbing : consultation ostensible de son smartphone en compagnie alors même qu’on nous adresse la parole.
athazagoraphobie : peur d’être oublié par ses pairs….

à partir de la p 29, Patino reprend des expériences en science du comportement faites dans les années 1930 sur des rongeurs… Quand une souris est mise dans une boîte équipée d’un bouton qui lui permet de faire tomber de la nourriture de manière régulière, on s’aperçoit que le rongeur se régule et n’utilise le bouton que lorsqu’il a faim. En revanche si la quantité de nourriture délivrée est aléatoire, le rongeur se met à pousser le bouton constamment, même s’il est rassasié. Les systèmes à récompense aléatoire, loin de faire naître la distance ou le découragement, jouent sur l’incertitude qui produit une compulsion qui se transforme en addiction. L’appât du gain,  même minuscule, empêche tout éloignement face au mécanisme… Avant d’être utilisé par les grandes plateformes du numérique, ce système a été appliqué dans les casinos et toutes sortes de jeux dits de hasard…

« sur Netflix, l’ergonomie du site tout comme certaines séries spécialement écrites pour la plate-forme sont fondées sur la théorie de la complétude afin de passer de l’habitude à l’addiction. Ce qui compte ce n’est pas la qualité de la série mais la frustration liée au visionnage incomplet. L’enchaînement des vidéos vise à ne pas interrompre la dépendance par d’autres sollicitations… » p.36-37

Décidément, nous vivons dans un monde de belles libertés !!!!

ne pas subir…

quelques petites lectures en passant, pour essayer de ne pas toujours « binger » en lieu et place d’exister !

Samuel Laurent, J’ai vu naître le monstre, Twitter va-t-il tuer la démocratie ?, Les Arènes, 2021

=> stimulant ou effrayant, comme vous le sentez. Un énième témoignage de repenti des réseaux, encore un esclavagiste qui veut se racheter d’avoir été inhumain ! Bon ! Ils sont gentils ces petits minous là mais ça ressemble plus à un gros coup de pub ou de déprime qu’une sincère mise en garde. La plupart de ces productions sur les RS sont déprimantes… Tant qu’on aura pas eu la simplicité d’appeler ces choses là par le nom qui leur convient, c-a-d le nouveau totalitarisme, on continuera à se prendre le mur ! On vous l’a dit et répété, il n’y a pas de leçons de l’Histoire.. On regarde les Hitler Jugend et les Komsomol avec un regard effrayé et apeuré, mais on laisse nos enfants sur les réseaux… Inconsistance de l’humain ! Bref, si vous ne le lisez pas, vous gagnez du temps pour lire des choses plus intéressantes…

Felix Tréguer, L’utopie déchue, une contre histoire d’Internet XVe-XXIe siècle, Fayard, 2019

Internet au XVe siècle, me suis-je dit, allons voir ce cocaïnomane chevelu …. De fait , les formations scientifiques ne produisent pas que des emmerdeurs. Le propos est très intello, utilise les références à la mode (Ah, Foucault, quel pied !) mais nous mène dans une réflexion stimulante sur l’Etat et les moyens qu’il prend pour maîtriser les outils de communication… D’où le détour par le XVe et le XVIe quand la Raison d’Etat naît comme une conséquence des guerres de religion et de la diffusion des idées par l’imprimerie. Comme si l’humanisme, dans son optimisme humain, avait provoqué un sursaut de l’Etat qui doit désormais s’adapter à un individu conscient de son individualité…
« Pour faire fonctionner l’espace public à son profit, l’Etat moderne a très tôt déployé 5 stratégies majeures qui forment la police de l’espace public :  la CENSURE, la SURVEILLANCE, le SECRET, la PROPAGANDE et la CENTRALISATION (des technologies de communication) » D’autre part, Internet a été essentialisé et l’utopie du départ a vite déchanté… L’utopie qui est ce qui mobilise le mieux, mais qui, ne trouvez-vous pas, semble en panne aujourd’hui ? Qui veut construire un monde meilleur dans un monde qui semble condamné ? L’Utopie s’avère aujourd’hui une possibilité de riches; les pauvres savent que sans révolution il n’y arriveront pas et que l’issue des révolutions ne dépend pas d’eux…

Byung-Chul Han, L’expulsion de l’autre. Société, perception et communication contemporaines, PUF, 2020

Dans la série, de temps en temps, il faut ouvrir un ouvrage d’un Allemand : « Le temps ou l’AUTRE existait est révolu »… « Ce ne sont pas la privation et l’interdiction, mais l’hypercommunication et la surconsommation, non pas le refoulement et la négation, mais la permissivité et l’affirmation qui la[=société] rendent malade »… « L’expulsion de l’autre met en marche un tout autre processus de destruction, à savoir celui de l’autodestruction »… « On propose en permanence aux consommateurs les films et les séries qui correspondent entièrement à leur goût, c’est à dire celles qui leur plaisent. Comme du bétail de la consommation, ils sont gavés de ce qui revient toujours à l’identique ».. « La terreur de l’identique englobe aujourd’hui tous les domaines de la vie.  On se rend partout sans faire d’expérience nulle part. On prend connaissances de tout sans acquérir une connaissance. On accumule les informations et les données sans aboutir à un savoir… »…  » Le Big data permet d’étudier les corrélations..La corrélation est la forme de savoir la plus primitive, elle n’est même pas en mesure d’étudier la relation de causalité, c’est à dire la relation entre la cause et l’effet. C’est COMME CA. La question du pourquoi est ici inutile. Rien n’est donc COMPRIS. Or savoir c’est comprendre. Big Data rend ainsi la pensée superflue. Nous nous abandonnons sans objections au c’est comme ça. »…

Julia de Funes, Le siècle des égarés. De l’errance identitaire au sentiment de soi, L’Observatoire, 2022.

Faut-il revenir sur la place de son grand père dans le cinéma français pour lire ce petit ouvrage bien fait et rassurant sur la capacité à penser des gens qui nous dirigent  ?… « à l’échelle individuelle, l’identité s’avère la plupart du temps un piège pour soi-même (…) Tentés à l’idée de croire que l’identité nous construit et nous fortifie, force est de constater qu’elle ne fait souvent que nous éloigner de nous-mêmes en nous confinant dans des emplois et des rôles. A l’échelle collective, il suffit d’un regard pour constater que les dogmatismes identitaires s’exacerbent et que l’universalisme perd de son prestige. Du temps des Lumières, l’universalisme était le chemin vers l’égalité et la liberté, il est désormais devenu, pour certaines communautés, synonyme de déni des différences et consolidation des injustices (…) En fin sur le plan théorique l’identité est un des seuls concepts à être si paradoxalement construit au point de ne mener qu’à des impasses philosophiques. Rien qu’en ouvrant le dictionnaire au mot « identité » deux acceptions contradictoires le définissent. Signifiant à la fois le même (être identique) et le différent (être spécifique), il est inévitable que toute recherche identitaire porte en elle une contradiction. »… et ça, ce n’est que le début !

ça peut toujours servir

=>Force est de constater que les sociétés capitalistes font la promotion d’une environnement culturel narcissique, avec une injonction à consommer, la glorification de l’individualisme à travers les réseaux sociaux et la téléréalité, et enfin une éducation permissive des enfants…. Les Narcisse, M.-F. HIRIGOYEN, La Découverte, 2019, p 287

=>A l’heure des fake, deepfake et du couronnement de la vraisemblance, on ne s’attarde plus guère sur le fond des choses pour se contenter d’une représentation, d’un monde de surface. En ce sens, ce qui importe, c’est de se croire libre plus que de vérifier si cette liberté est réellement en situation. » E. Godart, En finir avec la culpabilisation sociale, Albin Michel, 2021, p. 84

=> Nous sommes entrés dans un monde de soumission volontaire, condamnés à accepter de devenir responsables de choix que nous sommes contraints de faire ». E. Godart, En finir avec la culpabilisation sociale, Albin Michel, 2021, p. 111

=> « Plus la société évolue, moins l’humain avance » N. Rieux dans un article sur le film de Ken Loach Sorry we missed you

=> Les Narcisse n’existent qu’au travers du regard de l’autre. C’est pourquoi, dans une société d’image et d’apparence, ils sont rois et leur téléphone portable leur sert de miroir, à l’instar de l’étang où Narcisse contemplait son reflet. Or, dans un selfie, ce n’est pas soi que l’on voit, c’est l’image de soi à travers le regard d’un autre (…) Avec le numérique nous avons remplacé le vivant par l’image et l’amour de soi est devenu l’amour de l’image de soi. Or l’image n’est pas une vérité, elle montre seulement un instant pris sur le vif, ce qui importe peu car ce qui compte, c’est ce qu’on donne à voir, même si c’est une image fabriquée, un « faux-self », destiné à être conforme aux attentes des autres…. Les Narcisse, M.-F. HIRIGOYEN, La Découverte, 2019, p 350

=> depuis les années 2000, les jeunes hommes et femmes des sociétés occidentales louvoient souvent entre leur besoin d’amour et leur désir d’indépendance. Ile et elles se veulent libres, tout en aspirant à une vie amoureuse et sexuelle intense et épanouie. Du couple, ils et elles n’aimeraient farder que le côté gratifiant. Dans leur recherche d’amour plutôt que de construire une relation, ils et elles sont avant tout dans une quête d’eux mêmes, cherchant une amélioration possible de leur qualité de vie, pour arriver à « moi en mieux ». Mais quand on est trop plein de soi, comment laisser une place à l’autre ? Les Narcisse, M.-F. HIRIGOYEN, La Découverte, 2019, p 406

=> la diminution des capacités de socialité est accentuée et accélérée par la tendance, inspirée du mode de vie consumériste dominant, à traiter les autres humains comme des objets de consommation et à les juger, comme on juge les dits objets, au volume de plaisir qu’ils peuvent offrir, et en termes de « en avoir pour son argent », Z. BAUMAN, L’Amour liquide. De la fragilité des liens entre les hommes, 2004.

=> Notre monde de performance et de consommation a centré les individus sur eux-mêmes et, pour s’adapter, ils ont cherché à augmenter leur estime de soi en privilégiant leurs réalisations individuelles et en renonçant à des solutions collectives. Pour survivre dans une société globalisée, il faut être le meilleur et se placer au-dessus des autres, quels que soient les moyens pour y arriver. (…) La montée du narcissisme partout dans le monde peut être vue comme une réponse psychique à une société individualiste de performance et de consommation uniquement tournée vers le profit et le court terme. La mondialisation nous a entraînés dans une spirale destructrice, ses promesses de progrès infini, de bien-être et d’amélioration de qualité de vie se sont doublées d’un revers beaucoup plus sombre : les addictions, la montée des inégalités, le refus de l’autre et la compétition sans fin entraînant stress et burn-out. Les Narcisse, M.-F. HIRIGOYEN, La Découverte, 2019, p 525

=> Naitre à soi-même, c’est accepter que l’autre existe. C’est abandonner le rêve de toute-puissance que nous développons dans notre imaginaire depuis notre naissance – chacun d ‘entre nous entretient une sorte de religion privée et « croit » être le centre du monde, tout diriger – pour entrer dans la réalité de l’autre, le reconnaître hors de nous, hors de notre pouvoir et admettre qu’il nous échappe, que nous n’avons par de prise sur lui. C’est se séparer d’une partie de soi pour faire exister l’autre. D. DUIGOU, Naître à soi-même, 2007, p. 20

=> Comment pourraient-ils vivre autrement que dans le malaise, ceux qui proviennent d’une culture ancienne et à qui le contemporain paraît misérable, comparé à la splendeur légué par leur antiquité ? A. MEDDEB, Contre-prêches, Seuil, 2006, p. 73.

histoire et identité

Quand l’actualité recouvre des réflexions de fond c’est toujours intéressant. Quand les bidouillages institutionnels traversent des polémiques zappantes des réseaux ça devient passionnant..

Je n’ai cessé de vous dire depuis la rentrée, avec l’exagération bonhomme que peut donner la cinquantaine, que je me transformais, sous l’effet de la réforme de la réforme, en animateur de divertissement historico-géographique… C’est vrai, j’ai passé 25 ans à faire plonger les élèves vers une épreuve écrite de réflexion et de mémoire… L’épreuve a été emportée par le Covid, et même si ce n’est pas vrai aujourd’hui je dois faire plein de choses avec mes élèves mais ne plus les stresser avec cette épreuve.. Mes collègues de Français et de Philo continuent leurs épreuves de 4 heures mais pas nous… Réflexe de cour de récréation, oui , bien sur ! Autour de moi la salle des profs stresse les élèves pour des épreuves lourdes, et dans mon coin, petit Calimero, je n’ai plus qu’un contrôle-continu-peau-de-chagrin… Quelle libération d’un côté ! Quelle déchéance de l’autre ! Voilà la matière que j’enseigne : un des piliers de l’école systématisée de la fin du XIXe devenu la cinquième roue de la charrette…

Mais n’en perdez pas une goutte. L’Histoire et la Géographie restent fondamentales même si on les a placardisées ! La Géographie s’affole avec le changement climatique et les vieilles lectures géopolitiques encore à l’oeuvre chez nos gouvernants, et l’Histoire est un enjeu identitaire qui fait encore se battre dans nos écrans, et parfois mêmes nos rues et nos cours de récréations… L’arrivée de Zemmour parmi les candidats potentiels à la présidentielle nous replonge dans cette thématique de l’histoire identitaire.

Voilà donc quatre références à ne pas négliger dans ce domaine, données ici dans l’ordre chronologique de publication :
Ce pays qui aime les idées. Histoire d’une passion française de S. Hazareesingh
L’Histoire mondiale de la France dirigée par P Boucheron.
Destin Français de E. Zemmour.
Le venin dans la plume. Edouard Drumont, Eric Zemmour et la part sombre de la République, de G. Noiriel.

Notre CDI accueille le deuxième et ma bibliothèque le premier, alors que les deux autres sont consultables à l’Alcazar… Un petit banc d’essai…. 2015, 2017, 2018, 2019

lectures d’été

Incontournable, encore… Vous vous voyez bien agir dans les milieux décisionnels, économiques ou politiques…? Ce livre est votre bible : il décrypte à merveille cette « langue de bois », comprenez ces tournures et ces phrases qui ne veulent rien dire, qui sont là pour prendre la place, occuper l’espace… Éléments de langage, mots à la mode, circonlocutions, tout y est, y compris les récupérations langagières venues de l’étranger.. Le dernier en date est l’ « impact » que l’on trouve partout et à toutes les sauces.. Auquel il faudrait rajouter « anxiogène », « bien-être », « bienveillance »… etc … Une belle performance ancienne (2009), très marquée par la pratique de N. Sarkozy, J. Chirac et F. Mitterrand… ça tire dans tous les sens : devant la langue de bois il n’y a ni gauche ni droite… La langue de bois dissimule.. Oui, mais quoi ? De l’ignorance, assez souvent. Mais surtout ce que l’on ne peut pas dire.. Un responsable ne peut pas dire qu’il a commis une erreur.. Impossible ! Or devant le journaliste qui a chaussé les pieds de la vérité (là encore on est dans du politiquement correct car le journaliste fait son boulot, comme tout le monde.. il pose des questions emmerdantes pour pouvoir dire aux lecteurs-spectateurs que le responsables en question ne sait rien et les prend pour des cons, d’où le succès assuré du journal… Scoop !) qui le harcèle pour qu’il dérape, l’homme responsable-politique ne rompt pas la discussion.. Il en rajoute, il tourne autour du pot, jargonne parfois… Mais alors.. ? Tous pourris ??? Question populiste et démagogique ! Le responsable est forcé d’en arriver à la langue de bois. Parce qu’il ne peut pas avouer certaines imperfections, certaines motivations, certaines erreurs. Parce que quand on est responsable, on plonge dans le compromis, voire la compromission… D’où qu’on soit.. Autrement dit, cette langue de bois n’est pas la caractéristique du pourrissement des responsables ; c’est un trait de la responsabilité… La langue de bois c’est user du langage pour dissimuler ce qu’on pense, car on ne peut pas dire ce qu’on pense à tout le monde.. ça me paraît évident. On comprend les populistes qui critiquent le système et se présentent eux-mêmes comme anti-langue de bois… Mais bon ..! De ce que j’ai vu des leaders populistes, de droite ou de gauche, et plus encore dans les extrêmes, ils sont des êtres politiques comme les autres, donc ils adoptent la langue de bois. Désillusionnez vous, déniaisez vous rapidement ! La langue de bois est un sport qui est vieux comme la politique… Politique, polis, cité, démocratie, Grèce, programme de 6eme ! Dès les débuts de la politique, des penseurs ont sorti des manuels techniques de langage politique.. Regardez la Rhétorique d’Aristote, les Institutions oratoires de Quintillien… A l’Assemblée comme au tribunal, on est au talk-show.. Il s’agit d’avoir le bon mot, la bonne répartie, ne pas dire tout en ayant l’air de le faire, recourir à l’émotion.. Bref tout ce qu’on nous balance à la figure comme « décadence du système », c’est un vice initial.. Ne cherchez pas , ce sont les règles. Les Révolutionnaires vous promettront de faire table rase de tout ça.. avant d’y retourner ventre à terre.. L’exemple soviétique est suffisamment parlant… En bref, si vous êtes naïf-ve (encore faut-il se l’avouer), si vous êtes idéaliste et crédule et que vous voulez partir en science Po, réfléchissez 10 secondes : soit vous vous déniaisez à vitesse grand V et ce livre peut d’ailleurs vous aider, soit vous n’y arrivez pas et il vaut mieux essayer de faire carrière ailleurs, car les règles de la vie politique sont aussi violentes dans les fictions que dans la vraie vie…. Cool !
Maintenant, réfléchissons… Quand un prof, à court d’argument ou parce qu’il a la flemme d’en chercher écrit « Peut mieux faire ».. Qu’est-ce que ça veut dire ??? Et le « ça va ? » lancé tellement vite qu’on y attend aucune réponse… Langue de bois, élément du politique ? Ouais, mais sans doute humain avant tout….
Ce petit bouquin de Delporte, une véritable mine…
A l’Alcazar ! Vite !

Si vous aimez la chaîne you tube en question, vous trouverez dans ce livre une bonne partie des textes des vidéos. Ludique si on veut, ça fait un peu nunuche, comme toutes ces vidéos qui ont ça d’ambition auprès des plus jeunes. Donc c’est accessible. Mais le souci c’est que ce n’est pas bien structuré, sauf par chapitre-thème…. Vous y retrouverez les biais cognitifs comme Bronner les présente, mais abordés d’une manière simple… Les biais cognitifs vous ne connaissez pas ??? C’est toutes les petites choses qui s’immiscent dans nos esprits quand on essaye de comprendre les choses, de discuter, de répondre aux questions qu’on se pose… Toutes ces petites choses qui nous font nous planter comme des bleus… Si vous voulez creuser, associez le livre et les vidéos. On le trouve même en téléchargement sur les interwebs….

Pour ceux qui croient encore (les pauvres d’esprit) que l’histoire n’est que succession indigeste de dates, voilà un truc que vous ne lirez pas avant 50 ans… Alors prenez de l’avance, ce livre, son pitch, c’est du dingue à chaque page.. Ce mec se met à étudier la FATIGUE…. O pitalugue on n’a pas fini de se fatiguer à lire la fatigue… N’empêche, le Vigarello en question se débrouille bien pour mettre en évidence cet objet historique pas toujours identifié.. Regarder ce que je vois aujourd’hui dans le passé… Comme si on pouvait se préoccuper de la fatigue avant l’industrie et la psychologie ultra présente…

Pour en avoir une petite idée, regardez ça.. ça ne dure pas longtemps et ça vous apprend comment on devient historien alors qu’on est pas parti pour ça.. ne manquez pas ces quelques minutes de culture à l’état brut… SUR ARTE… A voir à l’ALC et même en exemplaire numérique !

Un petit coup de mistral dans la tête de ceux qui applaudissent jour après jour à notre belle mondialisation et à ce génie chinois qui nous permet d’acquérir tellement de biens pour si peu d’euros. La lecture de ce bouquin est édifiante. Non que tout y soit parfaitement établi.. On peut même lire de belles approximations délirantes sur le rôle pacifique de l’Église en occident au moyen âge (oublier les croisades, ça ne se fait pas !).. Mais ça c’est du détail par rapport à la masse de choses que ce livre nous apprend.
On y voit un monde lentement mais surement englouti par la Chine qui utilise avec beaucoup de pragmatisme et de cynisme les règles occidentales pour s’immiscer à peu près partout. La Chine a réussi à se rendre indispensable, incontournable en achetant les différents acteurs. On ne peut rien contre un gars qui arrivent avec deux valises pleines de dollars !!!! L’occident ne peut plus rien contre la Chine. Les belles idées économiques ont entraîné tout le monde en Chine. On préfère faire travailler les chinois que nos ouvriers… c’est moins cher ! L’appât du gain a raison de tout : la morale, la nation et toute forme d’honneur !
Belle contribution au naufrage de l’occident dans bien des domaines, ce livre est fondamental pour garder les yeux ouverts… Oui tout n’est pas négatif… Bien sur on peut réagir… Et ça commence par la lecture de ce bouquin qui date de 2019, donc écrit sur les données des années 2010… Et depuis, la Chine continue !!!!

A lire vite.
A l’Alcazar, aussi !

des idées

quelques références pour essayer de comprendre le rôle des idées :

Déchéance de rationalité, G BRONNER, 2019.

Cet auteur est à suivre. Sociologue, il décrypte de manière sublime notre époque et nos comportements… Il en a d’autres comme La démocratie des crédules, 2013 qui devrait être le manuel d’éducation civique dans les lycées… Ce qui ressort de ces lectures, c’est d’abord ces différents biais cognitifs qu’il met en évidence face à la contagion des conneries qui circulent, rumeurs, fake, complotisme et tralala. Le dernier bouquin sort de son expérience dans une institution cherchant à lutter contre la radicalisation, sortie des attentats des années 15 et 16… On touche tout à la fois les rigidités institutionnelles, la pauvreté de raisonnement des institutions comme des radicalisés, mais aussi on voit bien que quand on ne donne rien à l’individu pour avancer, il n’avance pas… Liberté de choix, OK. Mais même le choix, ça s’apprend, ne serait-ce que pour conscientiser les critères… (Ah l’art des choix comme on dit à Privas) Il fait une belle incursion du côté de ce que veut dire croire… Lire Bronner c’est une bonne leçon d’EMC. Une bonne partie de son oeuvre est à l’Alcazar !

Vers l’égalité ou au-delà ? Essai sur l’aube du socialisme par L. FROBERT, 2021

Ce petit livre des éditions ENS (Normale Sup de Lyon) nous replonge dans les années 1830-1840, bien avant Marx, Mélanchon, les soviétiques, les écolos et les délires post mitterrandiens d’une gauche en déliquescence à l’heure du tout pragmatique-libéral-individuel… On se désole vite quand notre champ de vision se limite à notre nombril. L’intérêt (je ne dirais pas « l’utilité ») de l’Histoire est de nous faire connaître ce qui a été fait, dit, pensé avant nous. Et quand on se laisse prendre à la lecture des Anciens, on arrive à relativiser les drames en cours… ou les vacuités à l’oeuvre… L’absence d’imagination politique actuelle fait peur. Que nous est-il proposé, soyons honnêtes… A droite, il s’agit de jouir, en tout bien tout honneur… Croissez et enrichissez vous, peu de différences entre Sarkozy et Guizot, somme toute… Faire son beurre, profiter, consommer, vivre bien et honnêtement, ça se respecte… Il y a assez peu de perspective, sauf pour ceux qui cherchent.. Les autres n’ont qu’à construire leur vie comme ils le peuvent. Dans le fond c’est peut-être ça le bonheur. « Business as usual » ! Cette vision là est étayée par l’échec des stratégies collectives. Et à gauche que nous propose-t-on ? Ben rien de plus ! Ah oui : réagir ! Il FAUT… (ajoutez toutes vos revendications…). L’ETAT  DOIT (idem)… Il n’y a plus un projet à gauche. La construction d’un monde du DD n’est pas de gauche.. Derrière celui-ci s’emboîte des perspectives respectueuses des uns et des autres… La gauche a oublié ses fondamentaux, et ce livre nous les rappelle. La gauche ne construit plus de société, elle rame derrière les avancées de la droite, du capitalisme et du progrès technique.. ça va trop vite.. La gauche pense à partir de principes.. Mais ceux ci deviennent obsolètes quand ils ont été construits, car réagissant aux nouveautés d’hier, logique ! La richesse idéologique de ce début du XIXe jette une drôle de lumière sur notre début de XXIe siècle très faible, très peu inventif… Les idéaux de gauche sont pourtant présents, je les vois tous les jours dans les pubs : solidarité, fraternité, aide aux plus démunis.. Tout ce qu’on appelle en les dénigrant les « bons sentiments », ce sont eux qu’on attend en fait.. Voir des gens sourire, être accueilli, avoir un contact aimable, bref une société fraternelle en un mot.. Elle est dans les pubs qui nous vendent des machins fabriqués par des machines ou des gens mal payés…. Et puis, il faut bien le dire la gauche est condamnée : socialisme, communisme ont échoué et , naturellement, tout ce qui a échoué est fondamentalement mauvais : l’histoire n’est pas meilleur juge… Le nazisme était mauvais : condamné. Le communisme était mauvais : condamné… Pour toute personne ne voyant pas plus loin que son groin, c’est une évidence… Posez vous la question : la démocratie a été condamnée par nos Pères politiques, Voltaire et Montesquieu… Donc ? Nos démocraties sont bâties sur les principes de ces gens là qui ont condamné la démocratie.. Tout va bien ? Pour ceux qui commencent à comprendre, ce petit bouquin dresse le portrait d’une époque, le début du XIXe, presque à 200 ans d’ici, au moment où se construit notre société industrielle. Investissements, nouveautés, croissance, on se croirait dans un monde parallèle… Les pauvres sont là aussi, alors que la richesse éclate.. Monde parallèle : aujourd’hui les pauvres sont là ici, mais sans boulot… Les « prolétaires », ils sont en Asie du Sud Est… Et dans notre Europe des années 1830-1840, boursouflée d’orgueil technicien et évolutionniste, qui sécrète un racisme ordinaire parce que seuls les Blancs arrivent à connaître cette nouveauté industrielle, le libéralisme est maître. Monde parallèle ? Je reviens à ce petit bouquin qui raconte le début des « socialistes »: un Pierre Leroux déclare tout de go qu’il a inventé le terme SOCIALISME pour équilibrer le développement fulgurant de l’INDIVIDUALISME… Et là on ne peut pas ne pas se poser la question.. Pourquoi ceux qui nous dirigent, pourquoi nos contemporains n’ont-ils pas fait plus d’histoire…? Pourquoi croire qu’une vieille recette (le libéralisme) qui nous a mené à la guerre à plusieurs reprises serait la bonne solution ? Pourquoi quand je pose cette question avez vous le réflexe idiot de penser que le suis communiste, stalinien, mélanchonesque ? N’y a-t-il dans votre réflexion politique que le profit libéral ou le totalitarisme communiste… Le capitalisme libéral tout blanc et le communisme rouge sang…? et rien entre ??? Alors comment appelez vous cette société de la toute-surveillance informatique qui naît sur nos principes libéraux… la liberté ???  Ne savez vous vraiment pensé qu’en termes d’opposition individuel-collectif, alors que l’histoire du monde nous montre que les deux coexistent, et pas souvent avec bonheur, et que c’est même une des caractéristiques de l’humanité de toujours hésiter dans cette médiation entre individuel et collectif..? Autre opposition de laquelle il faudrait arriver à s’extirper : pragmatisme et utopisme.. Quand on est l’un on ne peut pas être l’autre… Le principe de réalité nous fait accepter la situation… L’utopie est la seule force qui peut nous en sortir et amener la réalité à avancer… Oui ! Même chez les capitalistes, puisque c’est cette tendance à faire du profit qui permet les investissements, comme les faillites.. Avoir toujours plus, c’est une utopie qui devient réalité en milieu capitaliste… De même l’utopie d’avoir un objet qui me met en lien avec tous mes amis a permis des richesses fabuleuses aux concepteurs de smartphones.. Alors pourquoi discréditer l’utopie alors qu’elle nous fait avancer ??? Mais dès qu’il s’agit d’utopie politique, il n’y a plus personne. Il faut vite condamner… Alors, et toujours pour les quelques uns qui sont encore là et qui ont compris, lisez ce petit bouquin d’histoire et d’histoire des idées. Voir éclore des pensées du collectif, dans toute leur variété, dans un moment de grande croissance industrielle et de grande confiance dans le progrès, c’est tout à fait stimulant pour percevoir aujourd’hui…. A l’Alcazar
… et si vous voulez toucher cette société capitaliste dans ses aspects sombres, je vous conseille S. SASSEN Expulsions, Brutalité et complexité dans l’économie globale, 2016 ou N KLEIN No Logo, 2002 et surtout Le choc des utopies, Porto Rico contre les capitalistes du désastre, 2019

Ce pays qui aime les idées. Histoire d’une passion française par Sudhir HAZAREESINGH – 2017

Un bouquin qui fait du bien à lire, quand un anglais se met à admirer la culture française ça vaut le détour… En plus on apprend pas mal de choses et on n’arrive plus à dénigrer notre pays bien aimé… Voilà ce qu’en dit un CR internet rapide :

Les Français seraient arrogants, présomptueux, ingouvernables… Mais ne seraient-ils pas, avant tout, de grands amoureux des idées?
Au fond, à quoi reconnaît-on la pensée française? Sans doute à son inextinguible vitalité : si les Français donnent l’impression de ne jamais débattre sans se disputer, c’est qu’ils ont l’exercice de la controverse trop à cœur ; s’ils passent pour des donneurs de leçons, c’est qu’ils aspirent à l’universel, au point de s’en estimer seuls garants ; s’ils sont râleurs, anarchiques et prompts à la révolte, c’est qu’ils ont l’esprit critique chevillé au corps ; s’ils se croient supérieurs, c’est qu’ils ont le goût de l’abstraction, l’art d’inventer des concepts qui séduisent au-delà des frontières – le socialisme, le structuralisme, l’existentialisme, la déconstruction, le mot même d’intellectuel. Enfin, s’ils exigent tant de leurs hommes politiques aujourd’hui, c’est qu’ils sont nostalgiques de leur grandeur passée et qu’ils refusent d’abdiquer.
Catalogue passionné des spécificités de la pensée française, ce livre nous décrit mieux que nous ne saurions le faire, en même temps qu’il nous pousse à interroger nos inquiétudes face à l’idée de notre déclin.

racisme et autre

030121.. fin des vacances lectures…
Un petit dernier pour la route…..d’abord cet extrait : Tania de Montaigne, L’assignation, p 18, Grasset 2018.
Voilà notre château hanté. Voilà les fantômes qui nous habitent. Ils parlent à travers nous, ventriloques invisibles. Sommes-nous racistes ? Bien sûr. Nous parlons tous la Race couramment, elle est notre langue maternelle depuis des siècles. Pourrions-nous ne pas l’être ? Bien sûr. Mais la tâche est ardue et le temps presse. Partout dans le monde, les rapports se tendent et se crispent avec cette idéologie pour toile de fond. Partout dans le monde, les nationalistes mettent des mots simples et rassurants sur cette peur de l’Autre qui nous habite malgré nous. Ils disent : « Tu as raison d’avoir peur ». Ils disent : « Je te comprends, ils ne sont pas comme nous. » Ils disent : « Quand ils ne seront plus là, nous irons beaucoup mieux. » Ils disent aussi : « Tu ne sais pas qui tu es, mais moi je le sais pour toi. » Et on les croit et on les élit. Ils disent : « Ton problème c’est les Mexicains », « Ton souci c’est les Noirs », « les Arabes », « les Juifs », « les Roms », « les Rohingyas », « les Yézidis »…. Et, face à eux, les communautaristes répondent en miroir, utilisant la même langue, le même dictionnaire. Chez les communautaristes, on ne dit pas un Français noir, mais un Noir de France, un Juif de France, un Musulman de France… La Race d’abord. Et on ne dénonce le Racisme que lorsqu’il touche la communauté que l’on pense représenter, faisant, tout comme les nationalistes, de l’antiracisme à géométrie variable. Ils disent : « Puisqu’on attaque les Noirs, restons entre Noirs. » Ils disent : « Ne discutons qu’entre Juifs. » « Ne pensons qu’entre Musulmans »… Comme les nationalistes, les communautaristes rêvent d’un monde où la Race mettrait de l’ordre dans la complexité des rapports humains. Les Musulmans avec les Musulmans, les Juifs avec les Juifs, les Noirs avec les Noirs… Ils disent « appropriation culturelle », « racisés », « insensibilité culturelle »… Ils disent « Tu parles comme une Blanche », « Tu n’es pas un vrai Noir », « pas une vraie Juive », « pas un vrai Musulman »… Communautaristes et nationalistes sont pris au piège de la Race, et nous avec…. à rapprocher avec ceci : IMAGE ou en VIDEO
….
et après Jaurès, voilà Chirac, en 2001 :
« Nous avons saigné l’Afrique pendant quatre siècles et demi, commença-t-il. Ensuite, nous avons pillé ses matières premières ; après, on a dit : ils (les Africains) ne sont bons à rien. Au nom de la religion, on a détruit leur culture et maintenant, comme il faut faire les choses avec plus d’élégance, on leur pique leurs cerveaux grâce aux bourses. Puis, on constate que la malheureuse Afrique n’est pas dans un état brillant, qu’elle ne génère pas d’élites. Après s’être enrichi à ses dépens, on lui donne des leçons. » extrait d’un article sur le bilan Chirac en 2007 dans LE MONDE

181220… vacances lectures
quelques références récentes sur la question du racisme :
Lilian THURAM, La pensée blanche, P. Rey, 2020
Aurelia MICHEL, Un monde en nègre et blanc, Seuil, 2020
Eeni EDDO-LODGE, Le racisme est un problème de blancs, Autrement, 2018
Tania de MONTAIGNE, L’assignation, les noirs n’existent pas, Grasset, 2018
Tania de MONTAIGNE, Noire, la vie méconnue de Claudette Colvin, Grasset, 2015
moins récents…..
Aimé Cesaire, Nègre je suis, nègre je resterai, Albin Michel, 2005
Tahar BEN JELLOUN, Le racisme expliqué à ma fille, Seuil, 1999
Frantz FANON, Les damnés de la terre, 1961
En lisant le livre de Tania de Montaigne sur Claudette Colvin, on retrouve l’ambiance décrite par Fanon dans les damnés de la terre. L’un porte sur les noirs américains dans les années 1950, l’autre décrits l’état des populations colonisées à peu près au même moment. Le lien entre esclavage-colonisation-racisme apparaît de plus en plus, surtout à la lecture d’A. Michel. Les différences se cristallisent dans une construction sociale de l’exclusion. Quand on vit dans l’exclusion (quel que soit le côté du mur) on a du mal à imaginer qu’il fut un temps où le mur n’existait pas, et que la vie peut exister sans mur…

au hasard…

Pensant que je ne peux enseigner que si je garde vivante cette matière que j’enseigne, je me perds parfois dans les rayons des bibliothèques.. Voilà sur quoi je tombe.. Pour ceux qui voudraient savoir, j’ai recopié le texte de Bregman après avoir écrit l’article suivant….

Lu dans <<Utopies réalistes>>, Rutger Bregman, seuil, 2017, lisible à l’Alcazar, 320.5 BREG…
extraits p 20-22

Il est vrai que l’histoire est pleine d’utopismes sous toutes leurs formes – fascisme, communisme, nazisme – de même que chaque religion produit des sectes fanatiques. Mais si un fondamentaliste religieux incite à la violence, faut-il pour autant discréditer automatiquement toute religion ? Alors pourquoi discréditer l’utopisme ? Faudrait-il simplement arrêter tout à fait de rêver d’un monde meilleur ?
Bien sûr que non. Mais c’est précisément ce qui arrive. Optimisme et pessimisme sont devenus synonymes de confiance ou méfiance de consommateur. Toute idée radicale sur un autre monde est devenue presque impensable. Les attentes par rapport à ce que notre société peut accomplir se sont spectaculairement érodées, nous laissant face à la dure et froide vérité qui veut qu’en l’absence d(utopie tout le reste n’est que technocratie. La politique s’est diluée en gestion des problèmes. Les électeurs oscillent de part et d’autre, moins parce que les partis sont si différents que parce qu’il est si difficile de les distinguer et que la droite n’est désormais séparée de la gauche que par un ou deux points de taux d’imposition.
Le journalisme nous présente la politique comme un jeu dont les enjeux ne sont plus des idéaux mais des carrières. L’université est devenue un lieu où chacun est trop occupé à lire et à publier pour débattre. Celle du XXIe siècle ressemble à rien tant qu’à une usine, comme d’ailleurs nos hôpitaux, nos écoles et nos studios de télévision. ce qui compte, c’est d’atteindre des objectifs. Croissance économique, parts d’audience, nombre de publications – lentement mais surement, la qualité est remplacée par la quantité.
Et tout cela est animé par une force appelée « libéralisme », une idéologie pour ainsi dire vidée de tout contenu. Ce qui importe à présent, c’est « d’être soi-même » et de « faire son truc ». La liberté est peut être notre idéal le plus élevé, mais notre liberté s’est vidée de son sens. (…) La scène publique doit être « neutre » – ce qui ne l’empêche pas d’être plus paternaliste que jamais. A chaque coin de rue nous sommes incités à nous gaver et à nous enivrer, à emprunter, acheter, suer, stresser et tricher. Quoique nous nous racontions sur la liberté de parole, nos valeurs ressemblent à s’y méprendre à celles que défendent les entreprises qui peuvent s’offrir des publicités aux heures de grande écoute. Si un parti politique ou une secte religieuse avait seulement une fraction de l’influence qu’exerce l’industrie publicitaire sur nous et nos enfants, nous serions déjà dans la rue et en armes.

Lu dans <<La société de défiance. Comment le modèle social français s’autodétruit>> Yan Algan et Pierre Cahuc, CEPREMAP, 2007/2016, lisible à l’Alcazar, 302 ALGA

Je ne suis pas arrivé à lire tout le livre… Toute ma culture socio-économique s’est effondrée en lisant ce brûlot qui a reçu paraît il le prix du livre d’économie… Extrait rapide :

En contrôlant l’ordre public et la distribution des ressources, l’État affecte la confiance de chacun envers les autres et envers les institutions. Or, de nombreux éléments empiriques indiquent que l’universalisme et la transparence des mécanismes de solidarité sont associés à une plus grande confiance. Ce n’est pas tant l’existence d’un Etat-Providence et le niveau des dépenses publiques qui emportent que le mode d’intervention et de régulation de cet Etat. p 48

je reprends :
« En contrôlant l’ordre public et la distribution des ressources, l’État affecte la confiance de chacun envers les autres et envers les institutions ». C’est à dire en étant l’Etat, l’Etat annihile la confiance… Là j’étouffe… en contrôlant l’ordre public, mais bon sang c’est le but de l’Etat.. Tu enlèves ça, il n’y a plus d’Etat… Ensuite, dire que l’Etat contrôle la distribution des ressources c’est peut-être pousser le bouchon libéral un peu loin… Quoi, nous sommes à Moscou ??? Que veulent ils dire ??? Bien sur que je ressens la pression de l’Etat dans mon pays…. Sans aller plus loin que Parcoursup… C’est le grand ordinateur qui va décider. Le recours c’est de mettre 18 à tout le monde.. Du coup, on annule l’évaluation et les formations du supérieur ne jugeront qu’à partir de l’origine des élèves.. C’est le résultat du trop d’Etat, les acteurs privés s’adaptent… Bien sur ! Mais au delà des exagérations, des abus, le fondement de l’Etat est la protection des citoyens, enfin je le croyais.. On m’avait appris que depuis la seconde guerre mondiale, l’Etat ça servait à ça… Après que les régimes fascistes aient fait de l’Etat un broyeur d’humains, après que le stalinisme ait été assimilé aux mêmes régimes, parce que broyeur d’humains également, j’ai cru en notre démocratie libérale.. Si c’est pour que de beaux esprits économistes viennent balancer le bébé avec l’eau du bain… Un jour un prof de fac m’a dit « depuis 1968 je vois tout mon monde s’effondrer ».. Je n’ai pas les mêmes idées, mais je peux dire pareil..depuis les années 1980, tout le monde mental dans lequel j’ai grandi, élevé dans un milieu chrétien démocrate, tout cela s’effondre… Ce qui était de l’ordre de la tentation, c’est un argument de vente. L’argent, regardé avec méfiance, est une des rares valeurs encore debout. Le groupe qui était une référence à l’intérieur duquel on essayait de percevoir les équilibres, est une lubie dépassée, seul comptant l’individu. Le bien commun qui était et devait être respecté, est au mieux un mal nécessaire, au pire un empêcheur de tourner en rond… On avait confiance en l’Etat, forcément massif, lent, rigide, mais protecteur… De forts comme des faibles.
je poursuis :
 » Or, de nombreux éléments empiriques indiquent que l’universalisme et la transparence des mécanismes de solidarité sont associés à une plus grande confiance.  » Et on cherche encore à nous faire croire que l’économie est une science… Pauvres naïfs ! L’économiste c’est celui qui vous dira demain qu’il a eu raison d’avoir tord hier… Oui, un peu comme le politique… Les données empiriques, tu les as en prenant un café ou pire au bar du coin, quand ils sont ouverts… D’ailleurs un peu plus loin, en affirmant que la multiplication des régimes particuliers de retraite sape la cohérence et la confiance, je me disais, ouaou il doit y en avoir pléthore… 10.. Il y en a 10, selon les mêmes auteurs ! C’est ça la complexité ? 10 régimes de retraite différents ? C’est ça la complexité ne pas avoir le même régime de retraite quand tu as passé ta vie sur les chantiers de construction ou quand tu as passé ta vie dans une bibliothèque.?? Bien sur que la transparence inspire confiance.. mais l’habitude de discréditer non !!! Mais les affaires politico-financières, non ! En France on est malade de l’égalité.. lisez « L’égalité du phantasme français » de Michel de Rosen, Tallandier, 2020 [disponible en numérique sur le site de la bibliothèque de l’Alcazar] c’est sur.. Il n’est que de faire l’histoire du XIXe pour comprendre que le « peuple » français le rechercher et tous ceux qui s’y sont agglomérés depuis ont adhéré à cette valeur… qui est sans doute la mieux transmise à l’école !! Donc c’est vrai ,en France si tu as pas l’air favorable à l’égalité, tu es mal vu… De là à dire que c’est l’Etat qui organise l’inégalité, il n’y a qu’un pas que les auteurs ne franchissent pas.
enfin :
 » Ce n’est pas tant l’existence d’un Etat-Providence et le niveau des dépenses publiques qui emportent que le mode d’intervention et de régulation de cet Etat. » Oh lala !!! Je m’ai trompé §§ Aïe Aïe Aïe !!!! En fait ils ne critiquent pas le système français, ils critiquent l’application française du système… Boudiou, ouf, l’honneur est sauf… Okay, donc vous avez compris.. L’Etat Providence c’est bien, mais ça doit être transparent… On doit mettre tout le monde au même niveau : que tu touches 1500 ou 15000 € par mois, tu auras les mêmes prestations, ça c’est l’égalité… Les complémentaires ? N’en parles pas c’est du ressort du choix de l’individu, ne l’oublies pas ! Notre modèle ce sont les pays scandinaves, Copy ? Norvège, 5 millions d’habitant et producteur de pétrole. Suède 10 millions d’habitants. Danemark 5 millions d’habitants….En voyant ça, oui je pense que effectivement on peut s’en sortir quand le nombre de dossier est plus faible.. Pour ceux qui rêvent encore du modèle scandinave, je conseille la lecture des policiers de l’école scandinave, justement.. H. Mankell, C Läckberg, entre autres.. Lisez et dites moi si ces pays n’ont pas de problèmes administratifs, n’ont pas de problèmes de racisme… Le modèle allemand, lisez la presse allemande, en traduction dans Courrier International.. Vous verrez que les Allemands ne sont pas si satisfaits que cela de leur système soi disant miraculeux.. Quand au modèle américain que nous suivons puisque rien d’autre n’existe, on voit, on sait ce que ça donne, ce que ça sécrète comme misère et désespérance… Ne soyez pas aussi idiots que ceux qui lisent cela en disant « tu crois que le communisme s’était mieux ? ».. Ayez l’intelligence de voir que la critique n’est pas la condamnation. Je suis heureux de manger à ma faim, d’avoir des gadgets qui me permettent de m’emmerder copieusement en ne pensant pas aux choses qui fâchent, d’avoir des vêtements, la mode etc… Je n’en oublie pas moins ceux qui sont empoisonnés par mes déchets, directs ou non, ces animaux contaminés par mes déchets plastiques, ces humains exploités pour que je vive bien… Et je ne peux rien faire.. En fait c’est ça qui mine ma confiance….

lecture….

Voilà quelques notes de lecture dans l’ouvrage de Chloé Morin « Le populisme au secours de la démocratie ? », Gallimard, Le débat, 2021.. Quelques passages piqués en gros au milieu du livre, pour montrer le développement de l’argumentaire. J’ai laissé de côté ce qui me paraissait de l’ordre de l’illustration pour ne garder que les grands traits de l’argumentation, les grandes étapes… Une analyse qui me paraît intéressante, à discuter, toujours !

Débat, communauté démocratique et essentialisation

p 95 « Le drame de la période actuelle est que face aux forces de dispersion et de désagrégation de la communauté nationale que représentent les identités nouvelles ou « tribus », nul ne semble plus savoir comment créer du « nous » dans recourir à l’artifice de l’essentialisation et de la désignation d’adversaires ou de boucs émissaires. »

p 100 «  La démocratie ne s’est pas construite, loin s’en faut, sur l’idée de consensus ou d’homogénéisation sociale, politique et culturelle. Dans une société du « même », nul besoin d’institutions délibératives pour mettre tout le monde d’accord, puisque les intérêts de chaque individu sont les mêmes. Dans une société homogène, il n’est pas besoin de canaliser les aspirations et les colères, de pacifier les antagonismes de classe, de religion, ou d’orientations idéologiques. La démocratie sert précisément à organiser la coexistence d’individus dont les intérêts divergent. »

p 104 « Nos institutions sont construites pour gérer une société plurielle, composée de groupes et d’intérêts divergents. »

p 105 « Tout différence, tout clivage n’est pas une menace en soi pour la démocratie. Au contraire, ils en sont bien souvent le carburant lorsqu’ils trouvent à s’exprimer de manière raisonnée dans le cadre de nos institutions. (…) le conflit politique suppose l’existence d’un pluralisme, d’une multiplicité de points de vue et d’intérêts. Mais deux avis qui s’opposent ne suffisent pas à constituer un conflit : deux individus en désaccord peuvent se contenter d’acter leur dissensus ou pire, de s’ignorer, renonçant par là à  »faire société ». Le passage de cette divergence à l’affrontement suppose de reconnaître son interlocuteur comme un adversaire avec qui engager un débat ou un rapport de force »

p 106 « Dans un monde perçu comme de plus en plus menaçant (…), mais aussi de plus en plus complexe, où il devient de plus en plus difficile de distinguer le vrai du faux, l’ami de l’ennemi, la recherche d’un groupe d’appartenance, d’une communauté dont on partage les valeurs et les codes, et dont on attend une reconnaissance sociale, est un réflexe primaire. »

p 107 «  de fait les exemples sont nombreux où le conflit est entretenu pour lui-même, pour cimenter un groupe, qui ne cherche pas à le dépasser puisqu’il y trouve indirectement une raison d’être. De plus en plus nos débats politiques tournent en rond (…) non pas parce que les gens seraient devenus moins intelligents ou qu’ils ne pourraient pas partager d’opinions sur tel ou tel sujet, mais bien plutôt parce que le débat ne sert pas à cheminer vers un compromis : il sert une fonction instituante pour l’individu ou le groupe dans la société. »

p 108 « … l’essentialisation remplace l’argumentation »

A propos des propos de M Valls sur les Roms en 2013 sur l’impossibilité de les intégrer en arguant des modes de vie trop différents des « nôtres » : « Sous couvert de tenir un « langage de vérité », il sort là du cadre du débat « de fond » (à quelles conditions et comment intégrer les individus qui arrivent sur notre territoire) pour se placer dans un cadre où sa résolution n’est plus possible : dès lors que deux « modes de vie » s’affrontent, c’est l’existence même de chaque groupe qui est en jeu. » p 109.

p 110 « Il ne s’agit pas de critiquer tel ou tel responsable politique de remettre en question telle ou telle orientation idéologique : tous les responsables politiques, sans exception, ont eu un jour recours à la dynamique identitaire pour construire des dynamiques d’opinion. Le problème est que, de plus en plus, ces dynamiques consolident des identités qui enferment, assignent et transforment l’adversaire en ennemi, et le débat en lutte à mort pour la survie du « groupe ». »

p 111 « … les modèles parentaux (« père fort », mère nourricière ») influencent notre rapport à l’autorité et au conservatisme politique (…) plus le style parental d’un individu est strict, plus il est enclin à percevoir les faits et les autres avec hostilité et à défendre des politiques de fermeture ou de fermeté. Par exemple, les répondants (à l’enquête menée dans le cadre de travaux de psychologie…) qui présentent un style parental strict sont 68% à estimer que l’identité de la France est en train de disparaître, soit 24 points de plus que ceux qui ont un mode de parentalité permissif. De même les premiers sont 67% à estimer que la France devrait fermer ses frontières aux migrants, soit 30 points de plus que les autres ».

p 112 « Le revers de la désignation de boucs émissaires est l’auto-désignation de « victimes ». (…) Comment construire du compromis quand on rejette absolument sa propre responsabilité ? Comment se réconcilier quand l’autre devient la source de tous nos maux, voire une menace existentielle ? »

p 113 « Pendant la catastrophe sanitaire du coronavirus, on a également pu observer une multitude de victimes autoproclamées. Comme nous sommes tous des victimes potentielles, la recherche de responsabilités est devenue une sorte de sport national sans que jamais nous nous interrogions sur nos responsabilités propres. (…) il ne se trouvait plus un seul Français pour assumer avoir voté pour les responsables politiques de tous bords* qui ont, depuis vingt ans, désarmé l’hôpital public. » *c’est moi qui souligne !..

p 114 «  Dans une société où il y a seulement des victimes ou des bourreaux, la seule logique possible est celle du ressentiment, de la frustration, de la vengeance et de l’affrontement – rien de commun ne peut se construire, aucun lien ne peut être tissé, et aucun avenir commun ne peut être envisagé. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si la plupart des dynamiques politiques actuelles misent avant tout sur l’instrumentalisation de ces logiques victimaires : plutôt que de chercher à créer des élans par le rassemblement, le compromis et la projection dans un avenir commun, la plupart des programmes politiques reposent sur la désignation de victimes et de boucs émissaires. »