est-ce que tu veux lire ?

Puisque vous le demandez…. Voilà quelques lectures recommandées pour l’été…

Pourquoi lire plutôt que de regarder des vidéos…?
D’abord parce que les vidéos vous les regardez tout le temps
Ensuite parce que la lecture vous laisse le temps de vous interroger plutôt que de ne faire que réagir quand le discours est extérieur et continu.. Oui bien sur on peut toujours mettre sur pause.. -mais honnêtement- qui le fait ?

Vous pouvez lire tout ce qui apparaît dans les articles repérés dans la catégorie A LIRE, comme compte-rendus ou fiche de lecture.. déjà !
Ensuite,  entre la seconde et la première, la lecture idéale serait d’abord la presse…Le Monde, Le Figaro, Libération pour la presse nationale sont faciles d’accès… Pour les plus intéressés, la lecture de la revue l’Histoire et de la revue Carto n’est jamais une perte de temps… Si vous voulez prendre de l’avance en Spé, regardez les pages du site consacrées aux chapitres.. Il y a souvent une bibliographie et quand j’ai eu la patience de le mettre vous verrez quels bouquins sont accessibles à l’Alcazar…
Entre la première et la terminale, les conseils précédents restent valables. Les plus accros iront lire Ian Kershaw, le dernier bon biographe d’Hitler et spécialiste de l’Histoire de l’Allemagne au XXe siècle (La fin 1944-1945). Il a dernièrement publié une histoire de l’Europe déclinée en 2 tomes L’Europe en enfer (1914-1949) et l’âge global (1950 à nos jours)… Top ! Méfiez vous des bouquins concours (qu’on court, cons courts…) souvent écrits par des profs dont les dents rayent le parquet sans réel intérêt…  Je me demande encore pourquoi on fait la pub du Siècle des excès alors que Géopolitique et géoéconomie du monde contemporain, Puissance et conflits est de bien meilleure qualité.. Vous avez compris aujourd’hui tout est marché.. Donc je vous conseillerais toujours davantage les bouquins des historiens plutôt que ceux des profs d’histoire… Regardez ce que ça donne dans les pages du site consacrées à sce po…

Pour les passionnés de lecture… Oui , je sais , vous êtes encore moins nombreux, le rayon Biographie au 3eme étage de l’Alcazar est à avoir le tournis… Là encore il faut se méfier des auteurs, parfois même de certains collections, mais c’est tellement agréable ! Personnellement j’ai apprécié mettre un oeil dans les bios de Plon-plon (oui, ça intrigue au départ), Mac Mahon, Pasteur, Clémenceau, Aristide Briand, Churchill (Bedarida), Mussolini (Milza) etc… Si vous voulez retrouver le frisson du film Stalingrad, lisez les mémoires de Vassili Grossman… etc…

A lire

Bruno PATINO, La civilisation du poisson rouge, petit traité sur le marché de l’attention,Grasset, 2019

Quand on lit ce genre de livre, on est forcément amené vers cette « voix qui crie dans le désert »… Adolescents, vous nous donnez un modèle de vie ! Nous, soi-disant adultes, savons parfaitement dire quelles sont nos erreurs sans avoir le moindre geste pour ne plus les commettre !!! Nous savons pertinemment depuis Rousseau que sans régulateur, le libéralisme ressemble à la loi de la jungle : qu’importe les victimes pourvu qu’au seuil de ma porte je puisse faire ce que je veux. Nous savons pertinemment que les intérêts des grands actionnaires sont contradictoires avec les nécessités humaines ; qu’importe, tant que les actionnaires me permettent d’avoir du fric ou de la technologie, tout est bon, y compris l’esclavage de gens que je ne connais pas, tant que je reste un bon démocrate ! Le sujet du bouquin est un peu dans cette veine.. Il permet de brasser toutes les conneries qu’on a laissé installer au bout de nos doigts, ces superbes machines qui semblent nous rendre service et qui, pour le coup, nous maintiennent en esclavage… Je retiens quelques éléments…

« Une étude du Journal of social and clinical Psychology évalue à 30 minutes le temps maximum d’exposition aux réseaux sociaux et aux écrans d’Internet au delà duquel apparaît une menace pour la santé mentale » p 16

« L’économie de l’attention détruit peu à peu tous nos repères. Notre rapport aux médias, à l’espace public, au savoir, à la vérité, à l’information, rien ne lui échappe.
Le dérèglement de l’information, les « fausses nouvelles », l’hystérisation de la conversation publique et la suspicion généralisée ne sont pas le produit d’un déterminisme technologique. Pas plus qu’ils ne résultent d’une perte de repères culturels des communautés humaines. L’effondrement de l’information est la conséquence première du régime économique choisi par les géants de l’Internet.
Le marché de l’attention forge la société de toutes les fatigues, informationnelles, démocratiques. Il fait s’éteindre les lumières philosophiques au profit des signaux numériques. » p 17

un peu de vocabulaire….
no mobile phone phobia => nomophobie, pour désigner la peur panique face à l’éloignement même éphémère de son portable…
phnubbing : consultation ostensible de son smartphone en compagnie alors même qu’on nous adresse la parole.
athazagoraphobie : peur d’être oublié par ses pairs….

à partir de la p 29, Patino reprend des expériences en science du comportement faites dans les années 1930 sur des rongeurs… Quand une souris est mise dans une boîte équipée d’un bouton qui lui permet de faire tomber de la nourriture de manière régulière, on s’aperçoit que le rongeur se régule et n’utilise le bouton que lorsqu’il a faim. En revanche si la quantité de nourriture délivrée est aléatoire, le rongeur se met à pousser le bouton constamment, même s’il est rassasié. Les systèmes à récompense aléatoire, loin de faire naître la distance ou le découragement, jouent sur l’incertitude qui produit une compulsion qui se transforme en addiction. L’appât du gain,  même minuscule, empêche tout éloignement face au mécanisme… Avant d’être utilisé par les grandes plateformes du numérique, ce système a été appliqué dans les casinos et toutes sortes de jeux dits de hasard…

« sur Netflix, l’ergonomie du site tout comme certaines séries spécialement écrites pour la plate-forme sont fondées sur la théorie de la complétude afin de passer de l’habitude à l’addiction. Ce qui compte ce n’est pas la qualité de la série mais la frustration liée au visionnage incomplet. L’enchaînement des vidéos vise à ne pas interrompre la dépendance par d’autres sollicitations… » p.36-37

Décidément, nous vivons dans un monde de belles libertés !!!!

Antiques

Dans la série « Les Romains ont tout découvert »….

Sénèque, (Ier siècle ap JC) La vie heureuse, I, 5 :

« Mais en réalité, le peuple se dresse contre la raison en défenseur de son propre mal. C’est pourquoi il se produit ce qui se produit  dans les assemblées où ceux là qui ont fait les magistrats s’étonnent que ce soient ceux-là qui aient été faits, lorsque l’inconstante faveur populaire a changé. Nous approuvons et nous condamnons les mêmes choses : c’est l’issue de tout jugement rendu à la majorité. »

III, 4  : « Toute cruauté vient d’une faiblesse »

IV, 4 (très politiquement incorrect dans notre société de consommation où rien n’existe sauf le plaisir et l’envie, à se répéter en allant faire son shopping !) « Vois donc dans quelle servitude mauvaise et nuisible sera esclave celui que les plaisirs et les douleurs – les maîtres les plus changeants et les plus arbitraires – possèderont tour à tour. »

débat en attendant

C’était un jour où les élèves (non pas MES élèves, mais LES élèves) ont relevé le défi du « – Bon aujourd’hui vous avez quelque chose à me proposer ? »… Cette proposition ne doit pas exister, en classe elle est « obscène », c’est-à-dire qu’elle n’a pas à paraître sur la belle et magnifique scène de la classe. Mais, toute comédie gardée, c’est aussi dire au corps collectif qu’il n’est pas là que pour entendre ou faire semblant d’entendre, mais aussi pour participer, prendre sa part….

« Vous avez dit un jour qu’on pourrait discuter sur le fait que la démocratie peut glisser vers la dictature … » Bon, je sais que j’en dis des conneries mais là !!! Mais qu’importe la contradiction, causons… La question sera donc officiellement : La démocratie peut-elle remettre en cause les libertés fondamentales ? Notre époque de populismes violents,  de néologismes aussi sots que « démocrature » ou « démocratie illibérale » ne laisse de poser la question, même si, posée ainsi, elle semble caduque.

Comment une démocratie pourrait-elle remettre en cause les libertés fondamentales car une démocratie c’est le respect des libertés fondamentales…? Sortez de vos conneries à 2 balles pour vendre vos canards, journalistes vendus ! La démocratie ne remet pas en cause les libertés fondamentales, qu’on se le dise !

Une fois qu’on est d’accord avec ça, il faut donc aller plus loin…

Pourquoi donc nos journalistes à la gomme (et autres spécialistes qui ne sont que des conquérants du pouvoir universitaire) nous parlent de démocratie « illibérale » ou de « démocrature » ??? <<Ne soyez pas servile>> me disait un jour un jury d’agrégation alors que je lui servais la soupe démago-pédagogique attendue… Parler de démocratie non libérale c’est tout simplement renier le caractère réellement démocratique du régime visé.. Et comme on ne peut pas, on ne veut pas faire tomber des régimes qui se disent démocratiques et qui ne sont pas ennemis dans la dictature on invente des catégories qui n’existent pas, des catégories médiatiques ou communicationnelles pour faire semblant de penser tout en restant dans le conformisme… Mieux vaut parler de « démocratie défectueuse » (flawed democracy) comme le dit cette étude de The economist qui paraît tous les ans depuis 2006 et dont vous pourrez trouver le dernier rapport (2023 et en anglais)  ICI

Dire « démocratie défectueuse » ce n’est pas dire « illibéral ». Une démocratie illibérale c’est un régime du style second empire qui n’utilise que le suffrage universel dans les outils démocratiques.. Et le vote seul ne définit pas la démocratie… Donc ce n’est pas une démocratie ! Pourquoi nos spécialistes (ou présentés comme tels) continuent de dire démocratie pour la Hongrie alors qu’ils ne l’emploieraient pas pour le second Empire ? Démocratie libérale, on sait ce que c’est. Quand un régime remet en cause un ou plusieurs des différents points que l’on a pu mettre en évidence en cours (SU + concurrence pour le pouvoir+alternance+libertés + égalité), la démocratie a des défauts.. Et ce n’est plus tout à fait une démocratie. Quand un pays se dit démocratique mais ne respecte pas ces conditions, on n’a pas à dire que c’est une démocratie : un régime autoritaire à tendances démocratiques c’est déjà plus honnête !

Le fond du débat est très clairement posé par l’évolution politique de la France du XIXe… Chaque régime se pose en solution de l’obsolescence du précédent. Chaque régime pose la question de qui est capable d’exercer le pouvoir. Pose le SU (1848) mais enlève les indigents (31 mai 1850). Repose le SU (1851) mais détourne les suffrages (candidatures officielles)…. Notre Ve République a perdu une de ses caractéristiques démocratiques avec la fin des cohabitations : Macron aurait été réélu mais sans forcément une majorité à l’assemblée deux ans après !  La cohabitation renvoyait les politiques dos à dos, à leurs responsabilités : faites marcher la machine ensemble et arrêtez les discours ! Le quinquennat a muselé le législatif au moment où on en a une plus forte attente !

La réforme des retraites met-elle un point final à la démocratie en France ? Disons le en manifestant, ça fait toujours du bien, mais le discours ne tient pas la route, c’est évident ! Les défauts inhérents à l’égalité existent depuis longtemps dans les pays appliquant ou cherchant à appliquer la démocratie (cf Tocqueville). Mais l’existence de défauts ne signifie pas l’annihilation du caractère démocratique. Les inégalités économiques croissent en régime libéral, et cela a des conséquences sur l’implication politique des gens qui font les frais de cette inégalité croissante. Et ceux qui nous gouvernent le savent. Égalité politique et égalité économique sont imbriquées mais on ne veut que l’une et pas l’autre, et parfois au nom de la seconde on est prêt à rogner sur la première…

Et là on arrive sur notre question…. Nos démocraties libérales se conjuguent avec l’économie libérale qui est créatrice d’inégalités là où le régime politique se veut créateur de liberté et d’égalité… Tout régime vit avec une communication. Les soviétiques, comme Robespierre, comme les totalitarismes de droite, l’avaient compris :  ces régimes diffusent la propagande qui sert à étouffer la personne pour mieux diriger et refouler des questions permissives pour l’exercice du pouvoir. Mais ça ne marche pas (finalement on en est pas plus malheureux !)… Nos démocraties libérales actuelles sont obligées de fonctionner d’une manière apparentée (et qui marche mieux !), car il faut  laisser le peuple loin des réelles questions.. On le voit avec les questions agricoles : mieux vaut nourrir quitte à polluer que de laisser les concitoyens le ventre vide : un ventre vide, ça se révolte. D’abord la bouffe ! Après, viennent  le confort et la consommation. Ce sont les services de propagande les plus fidèles des démocraties occidentales et en plus ils sont gratuits pour l’État. Pendant que le/la citoyen/ne passe son temps à vouloir avoir telle ou telle chose dans son salon, il/elle ne pense pas que ses dirigeants sont hors de propos. Le discours sociétal évoluant, les techniques de communication avec, il est donc bien plus important de passer sa vie sur les réseaux plutôt que de s’occuper de gérer notre pays entant que citoyen actif puisque cela n’est pas possible… « Panem et circenses » disaient les Latins !

On en est au point aujourd’hui qu’après des siècles de culpabilisation à propos de l’envie et la gourmandise ces défauts sont devenues aujourd’hui des qualités, des preuves de bonne citoyenneté.. C’est l’envie qui fait consommer.. Sans envie, pas de pub, donc pas d’achat.. Consomme et tais-toi ! Vote et tais-toi ! Mais peu de choses changent, finalement…

La démocratie n’échappe pas aux circonstances. La loi, la constitution sont des textes qui fixent les règles, mais pas toutes.. Puisqu’il peut y avoir une interprétation des textes.. La pratique et les principes ne correspondent pas tout le temps. Orban est élu démocratiquement en Hongrie avec une grosse machine hyper démagogique, et applique une politique qui n’est pas toujours démocratique : démocratie défectueuse. Macron est élu démocratiquement, mène une réforme qui est attendue depuis longtemps, qui arrive trop tard sûrement (on reforme un système de retraite au moment où les départs annuels à la retraite vont diminuer…puisque les derniers boomers partiront à la retraite d’ici 10 ans) et qui n’est pas admise par une majorité.. Il se dresse droit dans ses bottes, au garde à vous dans la merde, conte vents et marées… Mais quand on maintient la peine de mort contre l’avis d’une majorité, personne ne manifeste ! Donc ce n’est pas la position de Macron, du dirigeant à la De Gaulle, (Moi je bosse pour vous,  même si vous n’y croyez pas, avec un petit goût du discours de l’avant-garde révolutionnaire à la Lénine) qui pose problème… C’est la médiation entre les discours, la manière d’intégrer les revendications, la manière d’inclure les citoyens dans la réflexion. Mais en France, là où tout le monde prend son voisin pour un con tant qu’il ne le connaît pas, inclure est une vue de l’esprit….

Tout étant une question d’échelle, l’inclusion proche est plus simple que l’inclusion éloignée, c-a-d en terme d’abstraction politique…

Aujourd’hui, une problématique pose davantage de questions : celle du climat. Là, l’État doit tenir et fort, contre vents et marées économiques… Mais là, en revanche, Macron n’est pas aussi ferme, aussi déterminé. On l’aurait admiré pourtant s’il arrivait à faire passer aux gros dirigeants économiques des mesures efficaces et drôlement nécessaires pour limiter les pollutions en tout genre que notre système économique produit (..pour que les citoyens ne se préoccupent que de leur narcissisme et pas de celui de leurs dirigeants…)… Au moment où les citoyens voudraient avoir davantage la parole, les techniques de gestion des groupes ou des revendications se multiplient.. (Reproduction de ce qui s’est passé au XVIe avec la diffusion de l’imprimerie : n’hésitez pas à feuilleter le bouquin de Felix Treguer sur Internet qui s’intitule « L’utopie déchue »…).. La température monte et la biodiversité diminue : la priorité est là, et pas forcément dans les comptes d’un État (ou bien plutôt des organismes privés de retraite qui vont encore en bénéficier)  qui a toujours de la ressource puisque c’est dans sa définition….

En bref, que l’on ait un dirigeant qui en impose, pourquoi pas.. Dans le principe ce n’est pas trop le problème d’avoir un chef « qui en a »… En revanche, il faudrait savoir sur quels dossiers on aimerait qu’il soit inflexible.. Je n’aurais jamais manifesté contre un président (de droite ou de gauche) qui aurait imposé des réformes en faveur de la biodiversité et de la lutte contre le réchauffement, quels que soient les bouleversements du quotidien que cela implique.. Mais je dois vivre dans un monde parallèle, non ?

Je retourne à mes selfies…

ne pas subir…

quelques petites lectures en passant, pour essayer de ne pas toujours « binger » en lieu et place d’exister !

Samuel Laurent, J’ai vu naître le monstre, Twitter va-t-il tuer la démocratie ?, Les Arènes, 2021

=> stimulant ou effrayant, comme vous le sentez. Un énième témoignage de repenti des réseaux, encore un esclavagiste qui veut se racheter d’avoir été inhumain ! Bon ! Ils sont gentils ces petits minous là mais ça ressemble plus à un gros coup de pub ou de déprime qu’une sincère mise en garde. La plupart de ces productions sur les RS sont déprimantes… Tant qu’on aura pas eu la simplicité d’appeler ces choses là par le nom qui leur convient, c-a-d le nouveau totalitarisme, on continuera à se prendre le mur ! On vous l’a dit et répété, il n’y a pas de leçons de l’Histoire.. On regarde les Hitler Jugend et les Komsomol avec un regard effrayé et apeuré, mais on laisse nos enfants sur les réseaux… Inconsistance de l’humain ! Bref, si vous ne le lisez pas, vous gagnez du temps pour lire des choses plus intéressantes…

Felix Tréguer, L’utopie déchue, une contre histoire d’Internet XVe-XXIe siècle, Fayard, 2019

Internet au XVe siècle, me suis-je dit, allons voir ce cocaïnomane chevelu …. De fait , les formations scientifiques ne produisent pas que des emmerdeurs. Le propos est très intello, utilise les références à la mode (Ah, Foucault, quel pied !) mais nous mène dans une réflexion stimulante sur l’Etat et les moyens qu’il prend pour maîtriser les outils de communication… D’où le détour par le XVe et le XVIe quand la Raison d’Etat naît comme une conséquence des guerres de religion et de la diffusion des idées par l’imprimerie. Comme si l’humanisme, dans son optimisme humain, avait provoqué un sursaut de l’Etat qui doit désormais s’adapter à un individu conscient de son individualité…
« Pour faire fonctionner l’espace public à son profit, l’Etat moderne a très tôt déployé 5 stratégies majeures qui forment la police de l’espace public :  la CENSURE, la SURVEILLANCE, le SECRET, la PROPAGANDE et la CENTRALISATION (des technologies de communication) » D’autre part, Internet a été essentialisé et l’utopie du départ a vite déchanté… L’utopie qui est ce qui mobilise le mieux, mais qui, ne trouvez-vous pas, semble en panne aujourd’hui ? Qui veut construire un monde meilleur dans un monde qui semble condamné ? L’Utopie s’avère aujourd’hui une possibilité de riches; les pauvres savent que sans révolution il n’y arriveront pas et que l’issue des révolutions ne dépend pas d’eux…

Byung-Chul Han, L’expulsion de l’autre. Société, perception et communication contemporaines, PUF, 2020

Dans la série, de temps en temps, il faut ouvrir un ouvrage d’un Allemand : « Le temps ou l’AUTRE existait est révolu »… « Ce ne sont pas la privation et l’interdiction, mais l’hypercommunication et la surconsommation, non pas le refoulement et la négation, mais la permissivité et l’affirmation qui la[=société] rendent malade »… « L’expulsion de l’autre met en marche un tout autre processus de destruction, à savoir celui de l’autodestruction »… « On propose en permanence aux consommateurs les films et les séries qui correspondent entièrement à leur goût, c’est à dire celles qui leur plaisent. Comme du bétail de la consommation, ils sont gavés de ce qui revient toujours à l’identique ».. « La terreur de l’identique englobe aujourd’hui tous les domaines de la vie.  On se rend partout sans faire d’expérience nulle part. On prend connaissances de tout sans acquérir une connaissance. On accumule les informations et les données sans aboutir à un savoir… »…  » Le Big data permet d’étudier les corrélations..La corrélation est la forme de savoir la plus primitive, elle n’est même pas en mesure d’étudier la relation de causalité, c’est à dire la relation entre la cause et l’effet. C’est COMME CA. La question du pourquoi est ici inutile. Rien n’est donc COMPRIS. Or savoir c’est comprendre. Big Data rend ainsi la pensée superflue. Nous nous abandonnons sans objections au c’est comme ça. »…

Julia de Funes, Le siècle des égarés. De l’errance identitaire au sentiment de soi, L’Observatoire, 2022.

Faut-il revenir sur la place de son grand père dans le cinéma français pour lire ce petit ouvrage bien fait et rassurant sur la capacité à penser des gens qui nous dirigent  ?… « à l’échelle individuelle, l’identité s’avère la plupart du temps un piège pour soi-même (…) Tentés à l’idée de croire que l’identité nous construit et nous fortifie, force est de constater qu’elle ne fait souvent que nous éloigner de nous-mêmes en nous confinant dans des emplois et des rôles. A l’échelle collective, il suffit d’un regard pour constater que les dogmatismes identitaires s’exacerbent et que l’universalisme perd de son prestige. Du temps des Lumières, l’universalisme était le chemin vers l’égalité et la liberté, il est désormais devenu, pour certaines communautés, synonyme de déni des différences et consolidation des injustices (…) En fin sur le plan théorique l’identité est un des seuls concepts à être si paradoxalement construit au point de ne mener qu’à des impasses philosophiques. Rien qu’en ouvrant le dictionnaire au mot « identité » deux acceptions contradictoires le définissent. Signifiant à la fois le même (être identique) et le différent (être spécifique), il est inévitable que toute recherche identitaire porte en elle une contradiction. »… et ça, ce n’est que le début !

sens ou essence

Peut-on aller vite en besogne….

Léon Gambetta disait en 1872  » Rien a tenter, rien a espérer, rien a fonder, rien a tirer de la démocratie et du suffrage universel sans une éducation distribuée a pleine main » Le Havre, 18 avril 1872….

Pourquoi l’école ?

Pour éduquer tout le monde ? Non !
Pour donner sa chance à tout le monde ? Bof !
Pour inculquer la même chose  à tout le monde ? On se rapproche …. (mais le « quelque chose » qui est « inculqué »c-a-d enfoncé à coup de talon, ce n’est pas l’intelligence mais plutôt la soumission à la majorité et la culture de la débrouille…)

Diffuser les savoirs , pour un Etat c’est avoir des citoyens mieux formés… Source d’emmerdements, on le sait bien en France.  Source de richesse pour le pays, on a l’air de l’ignorer au pays de Descartes ! Ce beau pays qui, manifestement est toujours un pays d’aristos : je dois toujours être moi au dessus.. Ceux qui accepte d’être parmi d’autres ne sont que des manants du Tiers Etat… Donc l’enseignement c’est pareil : je dois réussir au delà, au dessus des autres… Et la culture est dirigée par ces gens-là qui s’estiment bien au dessus du vulgum pecus… On a le Bac avec mention, de toute façon, ça ne vaut plus rien… Il FAUT intégrer une prépa sinon on retombe à la Fac lieu de perdition car c’est là qu’on forme les profs…. Il FAUT intégrer une parisienne, histoire d’être loin des bouseux…. Avec cette mentalité des élites, pas étonnant que la cause éducative n’avance pas ! On a un système éducatif bidon, qui n’a plus d’armes, ni de considération. Pour redresser la pente, je ne connais pas les solutions, mais en tout cas, elles ne seront pas simples ni à trouver, ni à appliquer !
Oui on parle beaucoup d’enseignement dans notre pays, tout le monde y est passé.. Mais il s’agit toujours de critiquer les profs, les élèves, les parents, les ministres.. Jamais de changer la donne, jamais de mettre plus d’enseignants devant moins d’élèves.. La logique appliquée est même à l’inverse : toujours moins d’enseignants devant plus d’élèves…. et utilise les machines, ça te permet de gérer.. Donc de ne pas faire ton boulot, mais ça on s’en fout !
Toujours plus d’élèves en réussite, c’est tout ! Je traduis.. « réussir » ça veut dire avoir de bonnes notes, c’est tout ! En fait , je peux mettre 20 à tout le monde et on dira que mes élèves réussissent… Yes !

La méthode scolaire, soyons clair, c’est l’anti-intelligence, mais ce n’est pas d’hier.. Mais aujourd’hui on arrive  à faire des machines qui simulent l’intelligence comme des générations de jeunes l’ont fait et le font encore… « Comprendre » c’est « se saisir ».. Donc celui qui apprend par coeur ne se saisit pas, mais quand il va réciter, il feindra l’intelligence… Comme GPT !

L’arrivée du débat sur chat GPT va nous permettre de casser tout ça… Si le marché nous donne de l’intelligence à vendre, que va-t-on faire à l’école ?.. Que les pédago-démagos se rengorgent, nous, les profs, nous ne sommes désormais que des assistants de garderie, sans le côté sympa d’avoir de tout petits êtres innocents et balbutiants comme les vrais assistants de garderie !!!!

Voilà des siècles que nous apprenons à nos élèves à feindre l’intelligence en appliquant des méthodes.. L’éducation par objectifs, avec ses fiches méthodes, ses savoirs et savoir-faire, et savoir-être.. Balancez tout ça ! Les machines sont là ! Hourra ! Maintenant ce sont les machines qui vont apprendre cela, comme on passe le code de la route.. Bip ! Essaye encore !

Le seul enseignement qui soit un tantinet efficace, tous les profs vous le diront, c’est un échange entre deux êtres humains.. Le reste vous pouvez mettre à la benne.. La classe, l’école, les groupes, le collectif, tout ça vous pouvez balancer. La classe et le groupe ont des dynamiques et des fonctionnements qui parasitent la réflexion. Ensuite la discussion est bien entendu formatrice, mais le prof n’est pas nécessaire.. Sans doute pour faire 25 exercices de math ou de physique peut on se permettre d’être à plusieurs, mais se saisir d’une réflexion en philo ou en histoire, s’exercer à parler une langue, ça ne se fait pas en groupe…

Les méthodes sont là pour faire le lien entre l’intelligence visée et la pratique de groupe. Applique la méthode ça marche tout seul.. Bof ! Que fait on avec la méthode, on reproduit… Donc on simule sans stimuler ! On ne réfléchit pas, on fait semblant puisqu’au lieu de chercher et de suivre l’intelligence, on suit un protocole… Quand un chirurgien opère, il vaut mieux qu’il suive le protocole. Quand un philosophe travaille, quand un historien cherche, le respect des protocoles n’amène pas à l’innovation mais à la reproduction de ce qui a été déjà dit, finesse ou sottise, selon grosseur…

L’école est un grand centre de tri… Celui qui a de la jugeotte, quelle que soit son intelligence et son milieu social, s’en sortira.. Mais quand on est Teubé, on est Teubé… enfant de ministre ou enfant de chômeur… (la suite vous la connaissez; l’enfant de ministre a du fric et s’en sort, là où l’enfant de chômeur n’a que la rue…)

Inversement la massification de l’enseignement donne à tous des possibilités…  Mais seulement des possibilités, c’est-à-dire des perches tendues….  Certains ont réussi à les prendre et grandir avec, quelles que soient leurs origines, issus de l’aristocratie ou de l’immigration… Mais on est bien d’accord que du côté des élèves, il y a tous les cas, du grand Duduche bobo et idiot au fils de primo-arrivant dont l’intelligence perce les yeux embués de pleurs.. Mais côté adulte, même combat : l’ancien premier de classe avec son agrégation, bien installé, qui ne comprend rien à l’adolescence parce qu’il n’en a pas eu, et fait régner la dictature humiliante dans son Lebensraum, la prof trop cool, branchée actualité, qui sait parler à tout le monde etc…. Aujourd’hui se rajoute ce super système qui rend obligatoire d’un côté l’embauche rapide de personnel d’éducation qui font des fautes d’orthographe, et d’un autre, le harcèlement de jeunes diplômés qui doivent déjà apprendre leur métier sur le tas mais malgré tout  rendre des compte à ceux qui ne les ont pas formés !!!

Oui, notre modèle s’épuise. N’étant pas révolutionnaire , je ne vous proposerais pas une remise en cause totalitaire du système, trop vieux pour ça. En revanche, revenir au fondement de notre activité de prof : multiplier l’individuel ou le tout petit groupe. L’échange est le seul moment humain de notre métier et si on l’oublie on laisse les machines faire.. Parce que vous savez qu’à force de faire des grilles, on ne fait que préparer le règne de la modélisation, donc de la mécanisation. Et l’échange que tu vas avoir avec ton élève n’est pas l’échange qu’il aura avec chat GPT…

Retrouver le sens… Retrouver l’essence…  Ce ne sont pas que des sons qui rebondissent… Le sens et l’essence de nos vies, de nos actions, c’est quand même ce qui reste de notre humanité une fois qu’on a enlevé tout ce qui fait du bien sans nous faire grandir : le confort, la consommation, le pouvoir, la technique … Redevenons humains c’est urgent….

Et le sens et l’essence de mon métier il sont  dans ce texte là de Montaigne et personne ne me l’a donné lors de ma formation…

Michel de Montaigne, 1533 – 1592, extrait « De l’institution des enfants » ( Essais liv I ch 26 )
Je voudrais aussi qu’on fut soigneux de lui choisir (à l’enfant) un conducteur (=prof)qui
eût plutôt la tête bien faite que bien pleine, et qu’on y requît tous les deux, mais plus les mœurs
et l’entendement que la science, et qu’il se conduisit en sa charge d’une nouvelle manière .
On ne cesse de criailler à nos oreilles, comme qui verserait dans un entonnoir, et notre
charge, ce n’est que redire ce qu’on nous a dit .
Je voudrais qu’il corrigeât cette partie, et que, (…) selon la portée de l’âme qu’il a en main,
il commençât à [lui faire] goûter les choses, les choisir et discerner d’elle même : quelquefois
lui ouvrant chemin, quelquefois le lui laissant ouvrir . Je ne veux pas qu’il invente et parle seul,
je veux qu’il écoute son disciple parler à son tour (…)
Il est bon qu’il le fasse trotter devant lui pour juger de son train et juger jusqu’à quel point
il se doit ravaler pour s’accommoder à sa force . A faute de cette proposition nous gâtons tout :
et de la savoir choisir, et s’y conduire bien mesurément, c’est l’une des plus ardues besognes
que je sache ; et est l’effet d’une haute âme et bien forte, savoir condescendre à ses allures
puériles et les guider . Je marche plus sûr et plus ferme à mont qu’à val. (…)
Qu’il ne lui demande pas seulement compte des mots de sa leçon, mais du sens de la
substance, et qu’il juge du profit qu’il aura fait, non par le témoignage de sa mémoire, mais de
sa vie. Que ce qu’il viendra d’apprendre, il le lui fasse mettre en cent visages et accommoder à
autant de divers sujets, pour voir, s’il l’a encore bien pris et bien fait sien, prenant l’instruction
de son progrès des « Pédagogismes » de Platon . C’est témoignage de crudité et indigestion
que de regorger la viande comme on l’a avalée . L’estomac n’a pas fait son opération, s’il n’a fait
changer la façon et la forme à ce qu’on lui avait donné à cuire.
Savoir par cœur n’est pas savoir.

Arbeit

Le deal était simple…

Tu lis l’article de Libé du 22 septembre 2022 intitulé  » Les gens veulent un travail où ils se sentent utiles »…

Ensuite tu discutes avec tes potes pour comprendre En quoi le travail est essentiel au lien social….

Enfin, une petite synthèse écrite et rendue…

L’article, il était sympa parce qu’il évoquait les souci qu’on peut avoir au travail .. en particulier sur le sens qu’on trouve dans le travail… L’article disait de manière quasi claire que le travail perd son sens par un certain nombre de méthodes appliquées dans tous les domaines et que l’article résume sous les termes « management par le chiffre » et le « reporting ».. Deux habitudes que les patrons et ceux qui font la mode dans les méthodes de travail inculquent (=enfoncent à coup de talon) à tous dans nos sociétés… Le travail qui a du sens est un travail qui laisse un minimum d’autonomie, qui laisse un minimum de place aux liens sociaux, justement… Or ce travail, que l’article qualifie de « travail vivant » est justement celui que les patrons veulent le plus maîtriser car il est le plus imprévisible… La boucle était donc assez simple finalement : le travail est essentiel au lien social car le travail est un lien d’échanges et de rencontres.. Ok ! pas la peine de lire l’article pour répéter ce que dit votre petite soeur ou petit frère qui est brillant(e) en 6eme ! Mais on s’aperçoit que l’article dit l’inverse : le lien social est essentiel au travail, surtout au travail qui a du sens.. Et c’est le sens du travail qui crée un équilibre… Un travail sans intérêt peut convenir s’il est beaucoup rémunéré ou s’il ne prend pas tout le temps… Le travail « bullshitt », on en a tous fait… Tant qu’il est limité, tout va bien. Quand on ne fait plus que ça, c’est là qu’on craque… Ceux qui résistent ce sont les métiers où il y a du sens.. Franchement ! Vous croyez vraiment que les profs sont profs pour gagner du fric..? réfléchissez 10 secondes : ils sont payés moitié moins que leur anciens potes de classes ou de fac à diplôme égal… S’ils sont encore là, c’est qu’il y a autre chose dans ce métier… Du lien social et de l’humain qui font oublier les connards de tous âges qui encombrent nos bahuts publics comme privés, qui évacuent le sens ce métier qui en déborde..

Bref !

Le lien social, vous l’avez peut-être vu en éco, c’est un peu la spécialité de l’humain… (Oui j’entends les puristes à la mode, les animaux aussi ont des liens sociaux.. Mon objet d’étude s’arrête aux humains, désolé !) En revanche partir de ce genre de phrase de toute évidence, comme une vérité posée là .. Ce n’est pas la méthode. On a un argument, on le pose.. Mais pas un dogme.. Ou alors on n’est plus dans de la réflexion de science humaine, mais en théologie ! Or donc, les études et arguments avancés dans l’article sont intéressants pour nous mener vers le sens du travail. Celui-ci est en lien, un peu, avec le lien social.. C’est tout ce que je voulais..

Certains l’ont vu et l’ont dit. D’autres l’ont vu et l’ont mal dit. D’autres enfin en sont restés à la rencontre des collègues… Allez ! Boulègue !

FAUDRA M’EXPLIQUER

Ouais.. I’m too old for this shit… c’est sur !
Tu m’expliqueras, parce que vu d’ici je comprends pas…

L’Histoire Géo c’est très chiant, c’est sur…Et j’en sais quelque chose.. Du coup on a inventé la géopolitique scolaire dans laquelle on sert un bouillon acceptable partout et par tous… Un peu d’histoire mais pas trop, un peu de géo, avec beaucoup de schémas, des discours au vocabulaire soutenu avec ça de préciosité, et toujours cette superbe aristocratique qui se sert de la culture pour épater la galerie.. on ne change pas les Français !.. Pourtant, c’est pour ça que les sciences expérimentales et les maths emportent le marché depuis si longtemps… Les lettreux pédants et cultivés ont repoussé les gens intelligents chez les scientifiques… Mais aujourd’hui, dans notre belle société individualiste, l’aristocratie culturelle s’est refait une façade et apparaît sous le jour nouveau de la culture géopolitique qui permet de parler sans transition de Marcel Mauss, de la translation des reliques de Marie Madeleine, des soldats russes en Ukraine, des Mapuchés et de la riziculture du delta du Mekong…

Alors pourquoi les jeunes et les vieux sont-ils si cons ????

La réforme des prépas ECG permet enfin de choisir HGGMC dans ces conditions là (merci le JO…)

PRG ECG

alors pourquoi si peu d’élèves choisissent HGGSP en lycée alors qu’on reprend le même type d’enseignement en sup ???

pourquoi s’acharner à faire de l’économie théorique (ESH et donc SES en lycée) alors que votre culture historique et géographique est reprise en HGGMC…?

Les instances dirigeantes de nos matières ont tout joué d’avance. Les profs de SES ont un lobby énorme et très efficace, ils sont les maîtres du temps présent : ils ont réussi a maîtriser la réforme et comptent sur l’inanité, l’incapacité crasse de nos staliniens de profs d’histoire géo, inadaptés et inadaptables… Et ils ont raison…Laminés par la réforme qui fait passer une des matières fondatrices de l’école de la République (HG) en sujet à discussion pour la note sur parcoursup, nos pochards historiques laissent passer l’occasion, comme un vieux laisse filer le temps par manque de réflexes… Non d’un chien ! Au moment où l’HG est un enjeu de société, de mémoire, de construction individuelle, elle est liquéfiée et confiée à n’importe qui… Un prof d’ESH n’est pas formé pour faire de l’histoire ! Un prof d’éco ça modélise, c’est fait pour ça et c’est pour ça qu’ils font des maths ! un prof d’histoire ou de géo ce n’est pas un modélisateur, en tout cas pas comme ça… Faire de l’histoire ça prend du temps… Alors….

Prenez le temps de vérifier dans les annales des concours de commerce… Les sujets HGGMC ont déjà été traités en lycée… Et oui.. Pour une fois, l’enseignement en lycée sert à quelque chose !

Prenez le temps de discuter avec des gens du métier.. Ils vous diront que les passes d’armes de théorie économique sont dépassées..  Les profs d’éco ne sont pas d’accord, entre ceux qui voudraient faire plus de gestion et ceux qui veulent maintenir la théorie… Lequel aura le culot de vous dire que pour faire du commerce international vous avez plus besoin des dernières avancées de la science économique que de la connaissance de la culture de votre interlocuteur….?

Prenez le temps de discuter avec votre prof d’éco, j’en connais de passionnants, ouverts et cultivés… Et je n’ai rien contre eux. En revanche j’ai tout contre cette inertie grégaire qui fait qu’une matière intéressante et nécessaire dans certains domaines soit aussi négligée….

Prenez le temps, enfin, de lire le premier numéro du monde de l’année 2023… Page 30 vous pourrez lire quelques évidences sur l’économie « science lugubre » comme le confirme l’article de J Stiglitz qui fustige ces économistes  qui appliquent des recettes déconnectées des réalités humaines… Les traitements de choc affaiblissent les politiques ce qui fait flamber les sociétés…. Mais rassurez vous, tous ces décideurs ont appris leurs cours d’éco sur le bout des doigts… Pessimiste, Stiglitz ? « Fini le temps de l’optimisme qui prévalait a la fin de la guerre froide lorsque Francis Kukuyama pouvait annoncer la fin de l’histoire, sous entendant la disparition de tut adversaire sérieux du modèle libéral democratique. » Sans doute, mais qui a vécu les années 80 et le grand espoir de la fin du communisme ne peut être que déçu des 30 années de mondialisation libérale qui s’achèvent…. Il est extraordinaire de voir ces économistes du temple américain du libéralisme critiquer l’attitude des Etats… Vous lirez sur la même page l’article de A Deaton :  » Les économistes prétendent souvent à une expertise politique pour laquelle ils n’ont aucune qualification »…. » Non seulement la plupart des économistes n’ont pas prédit la crise, mais, selon certains, ils l’auraient même facilitée »… Les politiques ne sont pas mieux lotis puisqu’ils « utilisent leur analyse (celle des économistes) comme un ivrogne utilise un lampadaire : pour se soutenir, pas pour s’éclairer « … Deaton dit bien que le problème ce n’est pas la qualité médiocre des economistes… Non que point nenni ! C’est surtout la mauvaise utilisation des bons travaux…. Et de citer Keynes pour annoncer sa conclusion : « le problème politique de l’humanité consiste à combiner trois choses : efficacité économique, justice sociale et liberté individuelle » ce qui fait dire à Deaton :  » nous avons laissé de côte les deux derniers facteurs »….

Bises, et à l’an que ven !

PS1 : réaction d’un excellent collègue :

Il y a beaucoup de choses à dire et écrire sur le renoncement des profs d’HG face aux profs de SES.

Les concours BCE et Ecricome sont clairs à ce sujet : HGG, c’est strictement le programme de spé HGGSP 1ere/term, alors que ESH c’est strictement de l’éco. L’embrouille réside dans le fait qu’ils ont intitulé le truc « ESH » avec « histoire du monde contemporain ».

Même en éco, les élèves ont besoin d’histoire (sérieuse et faite par un prof d’histoire) pour comprendre les évolutions.

Dans le programme de la spé SES au lycée, en dehors de 2 ou 3 questions qui portent sur l’histoire éco et la socio, l’essentiel reste de l’éco et du droit. Donc si les élèves veulent capter quelquechose pour leurs prépas commerce, ils ont tout intérêt à conserver HGGSP avec SES et faire Maths Co en option (le retour des maths obligatoires l’an prochain devrait nous aider, car ce sera en tronc commun et les élèves auront moins tendance à garder la spé Maths du coup).

Cependant, les programmes de Spé SES au lycée révèlent que les profs d’HG se sont fait flouer en long, en large et en travers : la plupart des questions de socio correspondent à ce que l’on fait en EMC, et en Histoire aussi bien sûr. Il aurait fallu ne pas laisser les profs de SES se charger de ces questions-là, mais l’APHG n’a pas été au rendez-vous sur ce point visiblement… Trop tard.

Pourtant quand tu regardes le programme de Licence éco (les 3 années), il y a très très très peu de choses en histoire et en socio, même dans le parcours le moins « éco » et le plus « socio ». Donc il faut rappeler aux élèves que les profs de SES n’ont pas forcément toutes les compétences nécessaires pour les sujets socio-historiques…

Quand, il y a quelques années, on faisait en Première le chapitre « Croissance éco depuis 1850 », et aujourd’hui en Term avec le chapitre « crise de 29 », je ne me suis jamais privé de dire aux élèves que sur telle question ayant trait aux lois du marché ils devaient questionner leur prof de SES. Je n’ai jamais eu le retour de SES vers Histoire…

PS2 : quand un économiste fait de l’histoire ça peut être excellent, la preuve par Piketty