une page spécifiquement consacrée à l’Affaire…
une problématique : En quoi l’Affaire Dreyfus est-elle un tournant dans la IIIe République ?
– une fiche pour aller vite : fiche Dreyfus et DREYFUS OQQPCV un montage sur le rôle de la presse dans l’Affaire DREYFUS et la presse (HGGSP)
– un dessin pour montrer l’implication de tous dans cette Affaire et le lien HPI

et une analyse d’historien assez récente (2019) : Le moment Dreyfus Winock lhistoire
et sur cette page de cours HGGSP, une séance de travail sur Dreyfus…
une synthèse :
fin septembre 1894 : découverte du « bordereau », lettre retrouvée dans la poubelle de l’attaché militaire allemand à Paris par les services de renseignements (qui embauchait la dame qui faisait le ménage….), évoquant des relations anciennes et annonçant la livraison de documents militaires français… L’auteur anonyme est en fait le Cdt Esterhazy, mais l’Etat major incrimine le capitaine Dreyfus… Dès son arrestation le 15 octobre 1894, Dreyfus nie tout en bloc… Son attachement à la patrie associée à son origine alsacienne et la richesse de sa famille lui enlèvent les motifs les plus immédiats. Dès le 31 octobre Dreyfus est lynché dans la presse.
19 décembre 1894 début du procès
22 décembre condamnation
5 janvier 1895 dégradation militaire
21 février départ pour Cayenne
Si Affaire il y a eu, on la doit d’abord à la famille de Dreyfus, sa femme Lucie et son frère Mathieu. Au départ l’hostilité est partout. Même la communauté juive ne réagit pas vraiment. (en 1892 un capitaine juif avait été tué en duel par un antisémite notoire…). Si la défense de Dreyfus a pu être financée ce n’est pas par une mobilisation d’un soi-disant « syndicat juif » dénoncé par l’extrême droite. Les Dreyfus étaient riches et les proches également. Le président du Consistoire n’a jamais fait quoi que ce soit. Même les socialistes au premier rang desquels Jaurès lui-même, ne soutiennent pas Dreyfus !
A force de mobilisation, Mathieu Dreyfus arrive à faire paraître des articles éclairant l’innocence du capitaine, à l’automne 1896. Sans écho. Il fait publier le nom d’Esterhazy le vrai coupable dans le Figaro en novembre 1897. La réaction qui vient d’abord est celle des milieux antisémites qui prennent la défense d’Esterhazy. Puis, devant le silence de la classe politique, les autres journaux emboîtent le pas…
Le 13 janvier 1898, Zola publie dans l’Aurore sa « Lettre ouverte au président de la République » que Clemenceau fait précéder d’un « J’accuse » sur 6 colonnes à la Une. C’est le déclenchement de l’Affaire qui concerne dès lors les milieux politiques, journalistiques et intellectuels…
23 février 1898 condamnation de Zola => Appel et condamnation confirmée en juillet de la même année.
Pendant l’été les militaires sortent d’autres preuves qui ont été fabriquées en particulier le « faux Henry », fausse note rédigée par le colonel Henry dénonçant Dreyfus. Le 31 Aout Henry, arrêté, se suicide, ce qui vaut bien un aveu. Mais la révision est bloquée chez les militaires comme dans la justice. Ce n’est qu’après de la constitution du gouvernement Waldeck-Rousseau (avec des radicaux et des socialistes) , le 3 juin 1899 que le jugement de 1894 est cassé et un nouveau conseil de guerre est convoqué à Rennes. Dreyfus est à nouveau condamné mais le président signe le 19 septembre 1899 la grâce de Dreyfus. Le jugement de Rennes fut cassé sans renvoi par la Cour de cassation le 12 juillet 1906. Entre temps Zola est retrouvé mort chez lui.. Asphyxie due à des problèmes de cheminées ? Assassinat ?
Sur l’ANTISEMITISME de la fin du XIXe siècle.
Dans l’armée, les officiers juifs qui font carrière sont souvent mal vu. C’est le cas de Dreyfus aussi, qui, de plus, a du succès auprès des femmes…. A l’inverse, chez les Français juifs, l’armée apparaît comme un gage d’intégration. L’usage de l’époque est à se fondre dans la masse, et non revendiquer une identité spécifique. Les étrangers ou les juifs veulent surtout s’intégrer et ne soulignent pas leur originalité ; le rêve français est un rêve d’égalité, pas de préservation d’une origine.
Dans la société, l’antisémitisme se diffuse dans les dernières décennies du XIXe et le signe évident est la publication de La France juive par Edouard Drumont (1844-1917) en 1886 : le livre a eu 200 éditions jusqu’en 1914… Celui-ci dirige un journal La libre parole à partir de 1892 : Il dénonce le scandale de Panama en 1893 et n’a pas de mots assez durs contre Dreyfus à partir de 1894, mais aussi contre l’armée qui tolère la présence de juifs parmi les officiers !! La loi de 1881 protège la liberté d’expression, y compris dans cet antisémitisme qui n’est condamné que lorsqu’il arrive dans les cas prévus par la loi (diffamation, appel au meurtre…). C’est ce qui explique la publication les caricatures antisémites poisseuses et nauséabondes de cette époque….
L’ambiance antisémite de Paris en 1894-1895 est relayée par Théodor Herzl, un journaliste viennois, juif également, qui ressent cet antisémitisme de manière très personnelle. C’est, à ce que l’on dit, cet antisémitisme ressenti pendant l’Affaire qui a mené Herzl à élaborer l’idée de retour en Israël pour les Juifs… Le sionisme sortirait (et c’est un conditionnel car les faits n’ont jamais une seule cause !..) donc de l’antisémitisme exprimé lors de l’Affaire Dreyfus….
A côté de l’antisémitisme, se développe également un sentiment xénophobe qui ressort dans certaines affaires de violences faites aux étrangers comme celle du massacre d’Aigues-Mortes le 17 aout 1893. Cela ne veut pas dire que tous les Français sont xénophobes et antisémites.. D’abord parce qu’il faudrait également rajouter racistes, vu le succès qu’ont eu les zoos humains dans les mêmes années. Ensuite il faut comprendre (sans légitimer, bien sur) que cette époque est raciste et difficile avec la crise économique. Raciste par ce que les populations européennes sont saturées du discours sur l’avancée européenne et la domination du Vieux Continent et ne connaissent pas les populations non européennes ou seulement par des bribes d’informations qui sont le plus souvent des caricatures de la réalité. Les Blancs se sentent supérieurs, la technique le leur prouve ! Toutes les histoires colportées sur les non-européens et les non-blancs flattent le blanc ou rabaissent le non-blanc. Hors d’Europe, l’Européen se sent supérieur. Economiquement, la fin du XIXe correspond à un ralentissement de la croissance, perceptible par la population. L’ambiance de crise et les discours nationalistes donnent un terreau pour le développement du discours et des actes racistes. Dès cette époque les étrangers comme les Italiens ou les Polonais sont considérés comme des voleurs de travail qui revient aux Français…
BIBLIOGRAPHIE
A.D. HOUTE, Le triomphe de la République, Seuil, 2014
V. DUCLERT, L’Affaire Dreyfus, La découverte, 2006
n° spécial L’Histoire n°174, janvier 1994
J.D. BREDIN, L’Affaire, Fayard, 1993
M. WINOCK, Nationalisme, antisémitisme et fascisme en France, Seuil, 1990
M. REBERIOUX, La République radicale ? 1898-1914, Seuil, 1978